: Notes d'intention
N#1
Pourquoi ce choix après Un grand singe à l’Académie, Unplusun et Animalité ? J’ai beaucoup
aimé lire, dire à haute voix un texte écrit en 2005 par Edouard Levé, par ailleurs photographe,
auteur et performeur.
N#2
Je voulais travailler sur le plateau avec ces trois sortes de langage et trouver entre eux « les
points de capitons », ces moments d’enfance, de régression, de perdition, d’animalité où l’autre
est un havre éphémère. «Ces points de rencontre », un pan de l’enfance, où l’imaginaire a pris
sa source et où ces deux là, ces trois là ont puisé leur inventivité, leur révolte, dans le jeu, le
rêve, la solitude.
Je me suis appuyée sur des vrais moments décrits dans le texte d’Edouard, et dans ce que je
savais et avais vu de leur relation, Edouard Levé et Cyril Casmèze sont dans la réalité, cousins
germains. Je les ai vus vivre souvent ces instants inouïs de complicité inexplicable. J’ai voulu
faire le pari de mêler ces instants aux moments de solitude de leur texte, aux échos que ces
paroles différentes transmettent en dessous.
Nous avons eu une longue hésitation avant de vouloir finaliser ce travail, ce à quoi je rêvais avec
Edouard Levé n’était plus possible, (c’est lui qui aurait été sur le plateau). Edouard s’est donné la
mort trois jours après avoir remis son dernier livre « Suicide » à son éditeur (POL).
N#3
Alors, créer malgré tout ce spectacle ? Demander les droits à ses parents, son frère, dans le
tumulte de leur douleur.
J’ai laissé le temps au temps, j’en ai parlé alors avec sa famille, avec sa compagne. Oui, le texte
d’Edouard devait se poursuivre sur scène, comme ses photos continuent d’être vues, ses livres
d’être lus. Jamais dans ce spectacle, je ne parle de sa mort ouvertement, comme je ne parle pas
de la relation familiale de lui et Cyril, je m’appuie sur les textes, la relation des acteurs dans ce
que je souhaitais voir exister entre eux.
Geoffrey Carey, avec son accent rend la civilité, l’aristocratie, la drôlerie de la langue d’Edouard Levé, il part avec nous dans cette aventure langagière et épidermique.
Jean-Marc Istria qui a partagé avec nous nos deux précédentes créations, comme partenaire en
régie avec un univers sonore en direct, est cette fois sur le plateau, il est ce troisième homme
habité de sons.
Cyril Casmèze porte les mots de l’hypochondrie avec fragilité, force et ce corps particulier,
d’ « athlète animal ».
N#5
Encore une chose, j’ai choisi d’appeler ce spectacle CQPVD, en clin-d’oeil à Edouard Levé qui
lors de signatures de livres, n’écrivait souvent que les initiales dans ses dédicaces, créant ainsi
une énigme avec son lecteur, un jeu de complicité.
Jade Duviquet
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