Virgina Woolf écrit en 1929 que pour créer il faut qu’une femme ait 500 livres de rente, et une chambre à soi. « Nous sommes en 2022. Qu’en est-il du temps et de l’espace à trouver pour créer quand on est femme ? Nous n’avons pas à nous plaindre, me diront certain.e.s. Il ne tient qu’à nous de trouver le désir palpitant et parfois enfoui à l’intérieur de nous pour écrire, dire, créer. Il ne tient qu’à nous de trouver le chemin du désir que cela fait, entre les injonctions, les empêchements et les moteurs. Sans le savoir nous avons conçu et fait germer un voyage en faisant une commande à dix autrices du monde francophone. Une commande c’est vertigineux, mais une commande à dix autrices, c’est un vrai saut dans le vide. Quand j’ai reçu les textes, ce qui m’a frappé, c’est les liens qu’ils entretenaient secrètement entre eux. Ce sont des aveux d’abord : aveux d’impossibilité, aveux de désespérance et aveux de nécessité brûlante. Ce sont des généalogies : des grands-mères, des mères, et des filles qui sont évoquées sans en être totalement les sujets. Ce sont des mots en communs aussi : plumes, chemin, écriture, crier, nuit, nuit et nuit. Ce sont des convergences, des gémellités. Ce sont des chemins proposés pour se comprendre dans le regard de l’autre. Avec la création de cette forme inédite, nous avons décidé de nous frayer un chemin entre nous, avec nous, dans les broussailles d’un avenir qui s’obscurcit pour les femmes du monde. C’est un sentier pour pister le désir. Celui qui anime tout être humain. Un désir non géographique, un désir organique, puissant et en vue. C’est un chemin sonore et sensoriel, à travers des voix qui racontent. C’est une déambulation à l’intérieur du théâtre, comme s’il était une grande chambre à soi. Ou plutôt un immeuble de chambres à soi. Il y a des interprètes, une chanteuse, une illustratrice, deux créateurs sons. Qui sont niché.e.s un peu partout pour vous dire et vous partager. C’est une tentative. De créer. Et de vous faire sentir pourquoi. » Aurélie Van Den Daele.