Les participants à « Mon rêve d'Alfortville » ont dès le début été considérés comme des témoins, réunis pour livrer leurs observations et leurs réflexions sur la ville. Nous avons donc dans un premier temps cherché à constituer une matière faite de récits, de choses vues et d'expériences vécues. Il s'agissait de trouver un langage commun et de chercher ensemble une façon de raconter leur ville. Il y a eu beaucoup de débats, d'histoires, d'interrogations et de doutes.
Je me suis beaucoup tu, j'ai regardé, j'ai vu le groupe se constituer et la géographie humaine s'organiser. De la position de témoins, les participants devenaient acteurs des histoires qu'ils relataient, presque malgré eux. Nous ne parlions que très rarement de théâtre et les exercices que je proposais avait davantage à voir avec l'écriture ou la sociologie.
Nous nous sommes plongés ensemble dans une douce rêverie faite de petits riens.
j'ai ensuite tenté de rester au plus près de l'expérience vécue, en fixant juste des cadres pour permettre au spectateur de poser son regard.
Le moins de théâtralité possible.
Dire bonjour aux spectateurs, leur parler, leur raconter des histoires avec simplicité et naturel.
Ne pas chercher à raconter le réel sur la ville et sur nous, mais simplement donner à voir une perception, une impression.
Continuer à débattre devant les spectateurs, notamment sur la capacité de l'art à relater le réel.
Ne pas apprendre de texte, respecter une dramaturgie mais ne jamais dire les choses de la même façon, ce qui autorise tous les accidents.
Limiter au maximum la mise en scène, la direction d'acteur, la scénographie et la lumière. Un travail a été fait dans ces différents domaines, mais il s'agissait davantage d'accompagner et de soutenir que de diriger.
Mais bien au delà des règles que nous nous sommes fixés, nous n'avons cessé de dialoguer et de tisser du lien. Et c'est essentiellement cette chose ténue et fragile que nous racontons et que nous donnons à voir dans « Mon rêve d'Alfortville ».

Stéphane Schoukroun