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Noces de sang

mise en scène Vincent Goethals

: Présentation

Il n’y a aucun intérêt à vouloir dégager une symbolique particulière des pièces de Lorca. Inclassables, elles parlent d’elles-mêmes. Histoires au silence assourdissant, à la langueur sourde. Tout est rentré, retenu. Rien n’est dit. Jusqu’au seuil de l’explosion.
Histoires des corps contraints, des haines ravalées, des passions muselées. Histoires de la moiteur, de la déflagration de la chair. La chaleur est déterminante, dans cette dramaturgie. Comme une fatalité incontournable, on n’échappe pas au soleil de plomb des campagnes andalouses. Il régit et écrase tout. L’ombre et le silence deviennent les seuls recours, l’unique échappatoire.
L’interdit, à l’aune d’une religion omniprésente et castratrice, pèse lourdement sur les corps, intensifie les passions, ravive les rancœurs, dévoile sans fard et sans pudeur les âmes humaines dans toute leur noirceur originelle. Dès lors, les blessures sont béantes et le sang doit couler. La nuit délie les corps et la bête sauvage expie, expulse et éjacule : désir de sexe et de mort, un couteau érigé en sacrifice… et meurt du brisement de son cœur. Comme dans la horde, ce sont les hommes qui se battent. Les femmes attendent, silencieuses. Tendues. Elles sont la permanence, la mémoire. La haine. La rancune aussi.


L’essentiel du combat se déroule donc sous la peau : le silence aura la part belle. Le chant aussi. Et le corps bien sûr. La contrainte et l’explosion sont les deux pôles autour desquels se construit la dramaturgie du spectacle. Il s’agit avant tout d’orchestrer un rituel dont chaque acte est mesuré. Tout ici est convention. On est dans un théâtre, une église, une arène. Les lieux scéniques ne seront pas représentés dans un réalisme, la musique aura une place déterminante dans le spectacle (certaines scènes seront entièrement chantées et dansées) ; bref pas d’illusion naturaliste.


La scénographie sera avant tout un rapport instauré entre acteurs et spectateurs. D’où l’idée de diviser le public en deux gradins (le gradin en demi-cercle de Grignan, et un autre gradin adossé au mur du château, séparé en deux pour laisser les portes centrales du château accessibles pour la grande scène des noces proprement dites.). Configuration bi-frontale transformant l’espace de jeu en couloir. Pour passer, il faut tuer l’autre, ou lui faire l’amour, le prendre dans ses bras : on ne peut passer à côté. La confrontation est inévitable. Ainsi, le ponton qui traverse ce plateau sera tantôt couloir d’une maison, tantôt la table des noces, tantôt chemin de terre où le combat mortel aura lieu, tantôt piste symbolique où la lune poussera un dernier pas de danse macabre…


Scénographie épurée, chemin de traverse, ligne au bout du compte brisée, explosée à l’image de ces noces ravagées… et rouge, rouge comme un soleil incandescent et fracassé pour mieux mettre en valeur le noir du sang caillé.


Il s’agira moins pour nous de monter Noces de sang dans son anecdote de tragédie rurale, que de faire entendre, à travers ce texte brûlant, la voix de cet auteur incomparable. Dans cette adaptation, nous donnerons la part belle aux voix chantées ; puiser dans les Canciones espanolas antiguas que Lorca avait répertoriés avec passion, et s’échapper là-encore de tout folklorisme pour parvenir à une partition musicale qui remue les tréfonds des âmes et leurs douleurs incommensurables.

Vincent Goethals

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