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Amor Fati, que ce soit dorénavant mon amour !

Maxime Franzetti ( Mise en scène ) , Théâtre Du Balèti ( Conception )


: Note d'intention

À partir de textes de Frederich Nietzsche, William Shakespeare, Antonin Artaud, Roland Barthes

" Je ne suis pas un homme, je suis de la dynamite. "
Nietzsche le disait lui-même, et sa pensée continue, aujourd'hui encore, à produire un " effet de souffle " qui renverse et projette le lecteur, violemment, très loin de ses certitudes. Avec Nietzsche, nos convictions les plus intimes - qu'elles soient sociales, politiques, familiales ou religieuses - sont ébranlées. Moraliste, le philosophe s'est exprimé sur tout, par des formules cinglantes et des invectives lapidaires - un style qu'il manie mieux que tout autre. Incisives et féroces, ses visions n'ont rien perdu de leur puissance, et témoignent d'une exceptionnelle liberté de pensée : la vie, la morale, la volonté, le Bien et le Mal, la guerre, les femmes et l'amour, la littérature et la musique.
Nietzsche pousse l'Homme à se regarder en face, le remettre définitivement en question sur sa quête de vérité.
"Nietzsche démolit, il sape" disait Gide.
Il appelle à une réévaluation de toutes les valeurs. Des concepts tels que Dieu, l'âme, la vertu, le péché et la vie éternelle sont de simples imaginations, inventées par les mauvais instincts de natures malades. Tous les problèmes de politique, d'organisation sociale et d'éducation ont été falsifiés parce qu'on a pris les hommes qui étaient les plus nuisibles, pour des êtres hors proportion.
Nous n’allons pas traverser un nouveau Nietzsche mais plusieurs, chacun interprétant le sien. C’est ainsi que les Nietzsche se multiplient, se dédoublent et bien entendu se contredisent.
Idole ou ennemi ? Prophète ou malfaiteur ?
Nietzsche s’érige en poète, en penseur : il est bien plus qu’un philosophe.
Notre point de départ ou d'arrivée:
Et si Dieu mourrait ? Si nous assistions à la mort de DIEU ? Que se passerait-il en l'an 1 ? Que se passerait-il si le "surhumain" était au bout de son existence ? Quelle histoire inventer ?
Le problème n'est plus de prouver par raisons abstraites que Dieu existe ou n'existe pas, mais de libérer l'homme. La mort de Dieu apparaît ainsi comme la condition nécessaire, d'une certaine émancipation humaine.
Pour renverser l'ordre établi le courage ne se nourrit-il pas d'une vanité ? Chaque époque a-t-elle besoin de nouveaux héros ? Devrons-nous détruire les idoles à coup de marteau ?
La chute, l'ascension ou la crainte de la chute ?
Toute la philosophie nietzschéenne réside dans le fait de vouloir rendre sa place de créateur heureux et libre à l’homme, ce qui revient à tuer Dieu et tous les usurpateurs de pouvoir.
"Homme, ne croit pas que tu pourras décider toi-même de ton destin" l'ordre divin apporte ce malheur, aujourd'hui c'est le contraire qui est vrai, le temps de l'an 1 est venu.
Nous jouons un drame d'anticipation qui questionne l'origine de notre civilisation et nos croyances.
Aujourd'hui, la tendance est à l'individualisme. On veut vivre et jouir de la vie. Chacun se sent avant tout un individu qui doit se faire une place au soleil, et se forger sa propre morale ; personne d'autre ne doit nous la dicter. Prendre de l'assurance et savoir s'imposer, s'affirmer, gagner la confiance des autres, sans perdre son amour-propre, bref, une dose d'orgueil et d'égoïsme bien compris, c'est indispensable dans la vie pour réussir. Oui, la vie est un combat. Il faut se surpasser, l'homme est fait pour être surmonté... Est-ce notre nouvelle croyance ? Tuons DIEU...C'est Nietzsche qui va être content...
Cohabitent entre autres sur le plateau :
Le dernier pape, les deux rois, l'âne nouvellement couronné, le plus hideux des hommes (c'est lui qui a tué Dieu), l'homme à la sangsue, le mendiant volontaire, l'enchanteur, l'ombre voyageuse, le devin, Ariane, Thésée, Dionysos, son prophète Zarathoustra, un bouffon, le Christ, Saint Paul, Bouddha, un lion, des aigles, un nain, un singe et des serpents...
Et nous aussi. Penseurs sur scène, chacun avec "son" Nietzsche.
Un travail sur les aphorismes pour créer du sens, de l'histoire, du jeu. Se servir du souffle théâtral de l’écriture de Nietzsche pour composer notre dramaturgie. Nous essayons de savoir en quoi le texte nous permet d’être créateur de "valeurs".
Un travail sur l'humain (trop humain) que décrit Nietzsche.
Un travail sur le mythe et ses correspondances contemporaines. Des scènes de la vie de tous les jours dialoguent avec les mythes de toujours : Nietzsche y apparaissant comme un auteur d’aujourd’hui. C’est par Nietzsche que l’on éclaire l’Homme du jour.
Je ne prétends surtout pas à la reconstitution exhaustive de l’œuvre de Nietzsche. je ne prétends pas à l’exactitude littéraire. Le texte est un terreau à histoire et à extrapolation artistique.
Le mouvement extérieur, l’enchainement des événements, l’intrigue ne m’intéressent pas. c’est avant tout l’univers intérieur de l’Homme qui m’intéresse. Il m’est plus naturel de partir vers l’exploration de sa psychologie, de la philosophie qui le nourrit et les traditions littéraires et culturelles qui sont à la base de sa ronde spirituelle. Ce qui m’intéresse c’est l’Homme qui porte en lui l’univers. et pour donner expression à cette idée au sens de la vie humaine, je n’ai pas besoin de faire étaler derrière lui toute une trame d’évènements.
Pour Michel Foucault, l’un des philosophes français les plus influencés par Nietzsche, ce dernier est l’un des trois maîtres du soupçon, aux côtés de Marx et de Freud. Avec Nietzsche se fait jour le soupçon que nous ne disons jamais exactement ce que nous disons. Dès lors que, selon une formule nietzschéenne, "il n’y a pas de faits, mais seulement une interprétation des faits", tout devient signe ou symptôme à interpréter. Bien plus, "tout est déjà interprétation, chaque signe est en lui-même non pas la chose qui s’offre à l’interprétation, mais l’interprétation d’autres signes". L’archéologie foucaldienne sera elle-même une généalogie au sens nietzschéen. Car nous savons désormais "qu’à la racine de ce que nous connaissons et de ce que nous sommes, il n’y a point la vérité et l’être, mais l’extériorité de l’accident". La "mort de l’homme", annoncée par Foucault à la fin de "Les Mots et les choses", est en un sens l’ultime conséquence de la mort de Dieu.

Maxime Franzetti

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