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Reprise(s)

+ d'infos sur le texte de Olivier Robert
mise en scène Renaud Cojo

: Présentation

Reprise(s) – Intention Olivier


Reprise(s) n’aurait pu voir le jour sans ma réelle passion pour la boxe et ma rencontre avec le danseur Lee Black. Après un premier round scénique enrichissant placé sous la direction de Michel Schweizer, j’ai eu le désir de prolonger cette expérience à travers une série de petits textes-uppercuts associés à la rencontre de la grâce du danseur. À 37 ans, je veux partager ma passion de la boxe dans le contexte d’un spectacle vivant, ouvrant plus largement sur des notions de cette vie qui nous reste à partager malgré nos différences.


Je m’appelle Olivier Monserrat-Robert. Tombé dans l’univers pugilistique à l’age de douze ans, j’ai commencé à donner et recevoir des coups au Ring Villenavais, sous l’autorité de notre entraîneur Jean-Pierre Corp. Après un grave accident qui a laissé des traces dans mon corps d’adolescent, je me suis tourné vers l’arbitrage, puis, à la suite d’une fabuleuse rencontre avec Mike Tyson, je suis devenu journaliste. J’ai alors eu la chance de vivre ma passion pleinement, et de rencontrer mes idoles.


C’est justement à la suite de ce moment très privilégié passé avec "Iron" Mike Tyson, le 31 janvier 2000 à Londres, que j’ai eu l’occasion de faire la connaissance de Lee Black. Réunis comme interprètes dans Kings, notre amitié avec Lee Black n’a pas été bien longue à se révéler, et à s’affirmer. Nos présences associées sur la scène m’ont permis de découvrir une personne attachante et vraie dans sa relation, surtout lors de nos lointains et épiques périples. Je ne connaissais rien du théâtre, de la danse, et plus largement du spectacle. Au fil de cette découverte, l’idée d’un projet de création en commun autour de cette rencontre fortuite de la danse et de la boxe a lentement mûri dans mon esprit de nouveau conquérant de ces lointains territoires que je ne connaissais pas.


Pourquoi ? Tout simplement parce que Lee Black dégage une puissance et une grâce scénique qui associée à la technique de la boxe lui redonne le fondement de sa grâce originelle. Son expérience de « boxeur-danseur » avec Régine Chopinot dans K.O.K lui a ouvert une technicité propre au Noble art. L’idée de formaliser sur un plateau de théâtre cette rencontre improbable et nos deux fortes personnalités me séduit. Aujourd’hui, après une période de réflexion, notre travail porte le nom de… Reprise(s). C’est pourtant ici que pour nous tout commence… A suivre


Olivier Robert




Reprise(s) – Intention Lee


Pour moi la boxe n’est pas uniquement synonyme de combat, non ! ! ! Même si aujourd’hui les pugilistes soumis à des règles communes à des fins d’affrontement. Ce que j’aime par-dessus tout dans ce sport, ce sont les exercices pratiqués aux entraînements car ils permettent de trouver un équilibre technique et mental bien différent de ceux que je peux pratiquer en danse.


J’ai eu la chance de travailler avec Régine Chopinot pour la création de K.O.K. Pendant neuf mois tous les matins nous nous entraînions dans une vraie salle de boxe. Au début nous étions rapidement épuisés. Mais notre entraîneur savait nous motiver et nous pousser jusqu’au bout de cette force que nous savions estimer à l’époque. Il fallait s’oublier, se contrôler, se dépasser, se maîtriser…Très vite nous avions une excellente condition physique, une endurance inépuisable et le plus important pour moi un certain contrôle de soi-même grâce à une nouvelle technique de respiration.


Olivier et moi, nous nous sommes donc rencontrés dans Kings et lentement nous sommes devenus amis malgré nos différences établies principalement par des préjugés que nous étions susceptibles d’entretenir l’un pour l’autre avant de commencer ce travail. Nous étions naturellement attirés l’un vers l’autre probablement grâce à nos racines espagnoles. Olivier me fascine par son côté autodidacte. Dans Kings , Olivier avait un don réel de raconter son histoire sans être comédien. Au fil des représentations qui se sont accumulées, Olivier gardait toujours cette fraîcheur de nous conter son intime comme au premier jour, ce que peu de comédiens savent faire… Olivier sait transmettre sa passion. Derrière sa carapace de mi-lourd et un soupçon de brut de pomme il a un cœur d’ange et une vraie ouverture d’esprit. J’ai pu vérifier à plusieurs reprises qu’il ne s’agissait pas seulement d’un cliché souvent réédité à propos de ces personnes dites à forte personnalité.


La communication avec Olivier devient naturelle. Je crois que ce qui fonctionne pour nous c’est notre différence et ce respect commun pour nos différences.
“ Le Brut et La Grâce ”, lui dis-je souvent d’une manière affective. Nous devrions savoir transmettre cette rencontre à travers nos passions communes grâces à ses « reprises » offertes au public.



Lee Black




Reprise(s) – Notes du Metteur en scène


Des coups portés sur l’autre, ceux vêtus d’un gant de boxe obéissent à des codes lentement élaborés par la pratique. Soigner sa gauche, esquiver à droite, le corps reste cet épicentre en milieu hostile. Quand le vertige du danseur habite cet adversaire aux poings usés, reste à la technique, la quête d’un nouvel équilibre. Olivier « Tyson » Robert et Lee « Twisting » Black conjuguent la rencontre de l’uppercut et du mouvement de danse, en quelques reprises inspirées où la langue cherche sa place sans protège dents.


Reste au metteur en scène invité de trouver sa place, un peu comme le balancier qui vient réguler les pas de l’antipodiste sur le fil tendu du spectaculaire.


J’envisage de conduire cette rencontre sous le signe d’un partage associé aux pratiques symétriques du danseur et du boxeur. Il s’agira de réactiver la parole fragmentée d’Olivier sous formes d’uppercuts anecdotiques, en vue d’une acceptation plus largement ouverte sur une expérience de vie.


L’imagerie « classique » de la salle d’entraînement devrait graduellement ouvrir à une scénographie symbolique dans laquelle, l’événement de ces corps traversés par des expériences contraires, apporterait au projet son objectif ultime : la différence comme le salut de la communauté.


Renaud Cojo




Reprise(s) – Profession Perdant


« George et Jack sont de vieux amis. Un soir, sur le Vieux Port de Marseille, les deux septuagénaires croisent une mendiante.
– « Pauvre femme », soupire George.
– Mais je peux lui trouver un adversaire », rigole Jack, cyniquement facétieux.
Comme Ray à Harlingen (Texas), comme Johnny et Bob à New York, George et Jack font le même métier : boxing booking agent. En clair ils fournissent des boxeurs à tous les promoteurs du monde. Des bons, des mauvais, des très mauvais et des figurants de seconde zone, des palookas, des tomato cans, dit-on chez eux, aux Etats-Unis.


Parfois, pour dénicher un bon « client », George s’adresse à Jack. À Chicago, celui-ci règne sur un supermarché de « no-hopers », de sans espoirs du ring, prêts à boucler leur valise en trois minutes pour aller se faire massacrer la gueule à l’autre bout du monde, pour une poignée de dollars. On les appelle les Cowan’s All Stars, et ils sont de la lignée des Philadelphia Daeth Squads (les escadrons de la mort de Philadelphie), qui offraient leur chair dans les années 70. Leur profession : adversaires, journées man, losers, perdants.


Jack est une étoile des Cowan’s All Stars. Lorsque j’ai regardé son dernier palmarès, en 1998, il s’arrêtait à 22 victoires, 1 no-contest, 2 nuls et 75 défaites, mais le bilan est sans doute encore bien pire. Torrance a boxé sept fois en France. Résultat : 7 défaites, dont 3 par K.-O. Outre quelques têtes d’affiches nationales, il a rencontré une demi-douzaine de champions du monde. Jack Torrence a quarante-cinq ans, mais n’a ni famille ni travail. Sa mère l’a mis à la porte de son appartement du ghetto de Saint-Louis, parce qu’il refusait d’abandonner la boxe. La plus grosse bourse de sa carrière ? 4 500 dollars, environ 4000 euros. Généralement, il se contente de quatre ou cinq fois moins… Aujourd’hui, avec beaucoup de chance, il est privé de licence dans tous les états de son pays.


Walter Cowans, Milwaukee (Wisconsin), totalisait, à 36 ans, un palmarès de 26 victoires, 102 défaites et un nul. Il est venu juste une fois en France, pour prendre une trempe en huit reprises et pour visiter Marseille. Evidemment envoyé par George et Jack. Mais, c’est une exception, car son territoire est plutôt le Middle West et un cercle de réunions où l’on boxe pour 200 dollars devant une poignée de types qui ingurgitent du houblon jusqu’à plus soif, au fond de l’Arkansas ou du Dakota du Nord, là où l’on n’est pas très regardant sur l’identité. Alors, Walter Cowans se fout des interdictions : il boxe sous le nom de Jeff May, de Darrel Green, de Asmar Raheem Muhammad, de Mark French… Lui, c’est pire, il est mort huit jours après son dernier combat.


Olivier Robert - Septembre 2004

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