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Pijani proces

+ d'infos sur le texte de Bernard-Marie Koltès traduit par Ivica Buljan
mise en scène Ivica Buljan

: La Pièce

Un an après avoir achevé sa première pièce, Les Amertumes, « transposée de l'expérience relatée par Gorki dans Enfance », Koltès tira à nouveau la matière de Procès ivre d'un récit. Il s'agissait cette fois d'un roman très célèbre, et non d'une autobiographie, mais le principe était le même : «transposer», et non adapter.
Dans Procès ivre, la fiction de Dostoïevski est pour ainsi dire diffractée par le prisme du délire de Raskolnikov ou de l'alcoolisme d'un autre personnage, Marméladov, dont la déchéance est le pendant grotesque du désespoir du héros. 

L'écriture théâtrale est fragmentée, les séquences s'enchevêtrent ou s'enchaînent de façon onirique, les personnages surgissent dans leur étrangeté, puis soudain leurs voix se fondent les unes dans les autres avant un nouveau sursaut d'affirmation. 

L'aspect de réalisme halluciné de Crime et châtiment marqua certainement Koltès, dont presque toutes les pièces ont quelque chose d'un cauchemar éveillé. Mais le vrai sens de son dialogue avec Dostoïevski est encore ailleurs : dans ce déchirement qu'il partage avec l'auteur russe entre la tentation du nihilisme le plus radical et l'appel obstiné d'une autre condition pour l'homme. Cette autre manière d'être au monde, chez Dostoïevski, s'appelle rédemption ; elle n'a plus de nom chez Koltès, mais elle hante toute son œuvre comme une inconsolable nostalgie.

Et puisqu'il est impossible de ne pas s'interroger sur la résonance entre le crime de Raskolnikov et les meurtres de Roberto Zucco, le dernier personnage de Koltès, soulignons simplement ce point commun entre eux : le rapport vertigineux à la transgression comme la seule réponse disponible au désespoir. Une transgression qui chez Dostoïevski est une sommation à Dieu, et donc le signe ultime d'un lien de l'homme avec le sacré, et qui apparaît plutôt chez Koltès comme l'expression sombre et paradoxale d'un optimisme : ce que son Raskolnikov partage avec Zucco et la Gamine, c'est une manière enragée de faire sortir le monde de ses gonds, une façon suicidaire et scandaleuse de dire que quelque chose doit changer, et le peut.

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