Plus je grandis, et plus j'ai envie de danser avec toi, pour toi, Petit homme. Je vais créer un univers vivant, pour nous, où tu seras libre de me rejoindre, avec ton coeur, ta sensibilité, tes énergies, ta grâce, ta douceur. J'aurai un manteau-tapis très doux, où tu pourras te reposer. Des plumes autour du cou, que je te donnerai pour nous alléger, et rire... Nous lierons nos mouvements et nos regards, nos souffles et nos appuis... Nous nous amuserons en chemin dans des sons mystérieux et des chants d'oiseaux virtuoses... A nous de jouer, Petit homme...

Je suis passionnée par les chants d'oiseaux depuis toujours. J'ai un besoin presque quotidien d'écouter des enregistrements, des mélodies et timbres singuliers. De nombreux chants ont accompagné mes créations : le merle à poitrine tachetée (Turdus dissimilis) dans Là (et ici aussi) , le corbeau flûteur (Cracticus nigrogularis) dans Hopo'e, le barbu à tête jaune (Psilopogon chrysopogon) dans ōuli, le kamichi cornu (Anhima cornuta) dans Être ou ne pas être dans les nuages...

Aussi, j'ai pour l'artiste chanteuse Björk une admiration considérable. J'aime sa voix, la profondeur de ses musiques, la richesse de son énergie créatrice. Son dernier album Utopia me bouleverse parce qu'elle y mêle ses compositions à des chants d'oiseaux - à ceux que j'aime tant (un des plus beaux à mes oreilles, le leiste à poitrine rouge (Leistes militaris) qui est présent dans la chanson The Gate).

Alors, profondément touchée par cet album, j'ai conjugué ma sensibilité avec ces sons et ainsi s'est dessinée une chorégraphie éprise de diversité, de liberté, dans laquelle je me retrouve parfaitement. Ibijeau gris

Et puis, je suis sortie d'Utopia pour aller puiser aussi dans d'autres albums, toujours de Björk, et dans ma collection de chants d'oiseaux. Mes recherches m'emmènent dans des mouvements proches du bûto, de la danse hawaïenne ou des inspirations de Beach Birds de Cunningham, ou encore de Dream de Kazu Ono... Une chorégraphie habitée de forces et de douceurs, liée aux sons et parfois décalée…

Dans ce solo, je m'inscris dans une proximité forte avec le spectateur, le public (quatre vingt personnes maximum) sera tout autour de l'espace de jeu. Cela transforme mon écriture, l'enrichit singulièrement.

Anne-Laure Rouxel