La première fois que j’ai lu un roman de Marie NDiaye, j’ai été immédiatement absorbée par son univers, son écriture surprenante et singulière. Après ce roman, j’ai découvert Papa doit manger, un texte dramatique cette fois-ci, qui semble se nourrir du passé de son auteure, sans être pour autant autobiographique. Une histoire simple de la vie d’aujourd’hui dans toute sa violence et sa beauté, dont la force résonne longtemps en nous après la fin de la lecture.

Je ressentais depuis longtemps le besoin de travailler sur un texte dramatique. En effet, jusqu’à présent, j’ai travaillé mes spectacles à partir de thèmes, de personnages et d’images ; si l’ébauche d’un texte existait, il évoluait au gré du travail d’improvisation et ne trouvait sa forme définitive qu’à la toute fin du processus. La parole nécessaire, les mots naissaient du personnage même.

Le travail de texte est d’abord un travail de corps et de personnage. Les mots doivent se poser naturellement dans la bouche. Pour savoir qui les prononcent, comment sortent-ils de la bouche et comment arrivent-ils à l’oreille de l’autre, comment les corps évoluent dans l’espace, comment ces places vont influer sur l’émission de la parole... bref, avant de prononcer les mots écrit, il faut trouver la liberté du corps, sentir le personnage dans sa propre peau, le devenir petit à petit, l’incarner.

Marie NDiaye touche avec Papa doit manger des thèmes intemporels, ce qui rend ce texte plus actuel que jamais: l’abandon, l’immigration, le multiculturalisme... et tous les clichés qui vont avec.

Il est aussi question du combat des femmes d’aujourd’hui...
Et moi devant avec elles.

Sophia von Gosen