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Les Bonnes

+ d'infos sur le texte de Jean Genet
mise en scène Sophie Pincemaille

: Note d'intention

Il y a de la cérémonie, bien sûr. Solange et Claire, dans une auto-célébration jubilatoire à la gloire d’elles-mêmes et de leur maîtresse, accomplissent des gestes, profèrent des mots, les réinventant chaque fois. Il y a du rituel. Un rituel fortement inspiré par Madame dont elles copient les gestes et les attitudes, Madame qu’elles incarnent, augmentent, déforment. Madame qui exerce sur elles une fascination morbide et dont elles rêvent de se délivrer. Madame qui cristallise leurs frustrations et leur désir de crime.


C’est un jeu dangereux auquel elles se livrent. Un jeu obsessionnel, pathologique. Un jeu qui prête à la confusion des genres, la confusion des rôles. Un jeu à se perdre soi-même.


Il est question d'identité. De prise d'identité. De vol d'identité. Il est question de « se sentir à sa place ». Schizophrènes, les Bonnes briguent celle de Madame. Mais comment être Madame, quand on n’est que Solange ou Claire ? Fantasme d’être une autre. Dans le corps d’une autre. Douleur de n’être rien d’autre que soi. Désir de gloire et de reconnaissance. Refus du réel. Entrée dans la « folie »…


Mais la folie des Bonnes n’est-elle pas d’abord celle de Madame ? Madame qui n'existe en effet que par les Bonnes, qui font d'elle une vraie dame, jour après jour. Les Bonnes sont les accessoires de Madame, comme ses perles, son parfum, sa robe de Lanvin. Chaque jour elle les prend en otages et se déverse sur elles, les déprave, les aspire, les vampirise… Les Bonnes sont sous pression. Elles ont les nerfs à vif et leur corps crie. La douleur les érotise. Solange et Claire se vautrent dans le jeu avec tout l’engagement et la cruauté de l’enfance. Mais l’enfance est passée, évanouie dans les vapeurs de Madame.


Les Bonnes réussissent ce paradoxe : sauvagement charnelles, animées par des pulsions sexuelles et de mort, elles baignent pourtant dans une irréalité qui, jour après jour, les dématérialise un peu plus.


Les Bonnes ont quelque chose d'irréel, d'immatériel.


Il leur faut un corps à transcender pour se réincarner, quitte (surtout) à en mourir. Ce sera celui de Madame.

Sophie Pincemaille

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