Les Baigneuses. Première reprise du texte. Aboutissement d'un travail de recherche en compagnie de dix comédiens (neuf baigneuses et un baigneur travesti en baigneuse), d’un musicien, d'un chorégraphe, d'un éclairagiste.

Je vous dois la vérité en peinture et je vous la dirai. (Paul Cézanne)

Les « baigneuses », défaites et refaites sous l'œil de celui qui tente de les représenter (peintre, metteur en scène, spectateur). D'expérimentation en expérimentation, les corps s’imprègnent de la matière de la langue, laissent se constituer le personnage, émerger le sujet, la trame d'une histoire.
Travail au plus près de la polyphonie. Invention et jeu de l'accident jusqu'au surgissement du sens. Sonorités, volumes, surfaces, matières, mouvements, espace. Peindre avec des corps sur un plateau de théâtre. Chorégraphier les langues et les couleurs des voix. Les espaces investis comme «lieu à faire résonner », toile vierge à maculer, énigme à résoudre. Interrogation sur le sens né de l'entrechoquement des mots. Chaque baigneuse tour à tour noyée et rescapée - non pas de l'eau du bain - mais de l'immédiateté de ce qui se forme et se déforme sur le plateau.
La scénographie conçue essentiellement comme « espace sonore et espace lumineux» - Les Baigneuses (Demoiselles d'Avignon) dans l'aire de jeu, dans l'espace carcéral du tableau, dans l'architecture du lieu, seront confrontées à une installation sonore «noise gate» ou «porte du bruit» sensible à des fréquences ou à l'intensité des voix. Un seuil de déclenchement ouvrira ou fermera une ou plusieurs portes par lesquelles, de la musique dans sa course ou un sas de filtrage des propres voix des baigneuses remises en course, pourront perturber ou nourrir le jeu et se mettre en action.
Un orchestre de plage, constitué par les baigneuses elles même, viendra ponctuer les scènes. L'espace visuel révélé par la lumière aura lui aussi son autonomie et la dimension d'une installation plastique. Les quinze passages seront comme autant de coups de cutter, pour que naisse par défaut, dans les frottements, le vide nécessaire à la création.