: Note d'intention
Hassan Sabbah dit “le vieux de la montagne” - une légende passée aux filtres de différents récits de Marco Polo à Alfred Jarry
La première piste de travail qui se présente à nous est la construction d’un mythe. Comment
peut-il être constitué par différentes lectures, interprétations et fantasmes ? Ces légendes
nous renseignent plus sur le comportement des auteurs que sur le personnage historique en
lui-même. Partant de là, il s’agit pour nous d’examiner les processus de création d’un
spectacle de marionnettes. Il se présente lui-même comme un récit mythique ancré à la fois
dans le présent mais aussi volontairement hors du temps.
Un occidental raconte l’histoire d’un oriental. Cela provoque une rencontre des cultures et
sans aucun doute une énorme incompréhension.
En outre, il s’agit d’un temps - le XIIIème siècle - où la civilisation islamique était très
épanouie d’un point de vue culturel et scientifique. La civilisation Occidentale de Marco Polo
était en état d’ignorance comparée à celle, très avancée, où vivait Hassan Sabbah. C’est
cette ignorance qui rend le récit de Marco Polo si fascinant. Voyageant dans cette autre
partie du monde, il n’a aucune idée des systèmes de pensées, des avancées technologiques
ou mathématiques qu’il va rencontrer. Et il ne possède sans doute pas encore les concepts
nécessaires pour les comprendre.
La question de la connaissance, de l’ignorance, du renversement des valeurs est au coeur du projet.
La pataphysique de Jarry, loin d’être une simple élucubration de potache, se voulait « la
science des sciences ». Non pas en ce qu’elle les regroupait toutes, mais en ce qu’elle
s’intéressait aux particularités de chacune. La pataphysique est la physique du cas
particulier. Elle pose le principe de la marge d’erreur de toute loi physique. La science est
donc au coeur des créations de Jarry. La vision parcellaire du monde ouvre la porte aux
monstres de l’esprit, échappés des peurs et des fantasmes. L’esprit recompose ce qu’il
croit être le réel à travers quelques détails. Il y a un pouvoir immense de création dans
cette « conscience en sommeil » qu’est celle de l’ignorant. Ce pouvoir libère une énergie
imaginative et terrorisée. Ainsi, la science et l’ignorance sont des pistes de travail que la
Compagnie désire aborder dans ses recherches.
Dans le cadre de nos recherches autour de la science, nous voulions pouvoir développer
différentes formes de conscience afin de pouvoir confronter sur la scène à la fois des
marionnettes robotisées, des comédiens masqués, des personnages strictement robotiques
dont nous voulions tester le comportement. C’est le statut même du spectacle de
marionnettes qui nous semble ici en jeu, la confrontation des réels, des formes du vrai, de
l’illusion, du possible et de l’impossible.
Patrick Sims
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