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Le Cid

+ d'infos sur le texte de Pierre Corneille
mise en scène Sandrine Anglade

: Cette obscure clarté...

L’envie d’interroger l’alexandrin cornélien,
L’envie de m’atteler à une grande pièce épique du répertoire,
L’envie de travailler cette langue et cette fougue avec des acteurs au compagnonnage fidèle (Damien Houssier, Jean-Paul Muel, Laurent Montel, Pierre-François Doireau),
Toutes ces envies là ont prévalu à la création de ce Cid.


Au fil du travail se sont imposés des choix.
Celui du texte d’abord puisque il n’existe pas moins que trois versions du Cid (1637, 1648, 1660) au cœur desquelles Corneille remanie des vers, met en exergue le passage d’une monarchie à une autre (de Louis XIII à Louis XIV). La version établie s’inspire pour l’essentiel de celle de 1637, Cid de la jeunesse, plus fougueux, plus archaïque parfois dans la langue.
Autre choix : celui de synthétiser les rôles en de grandes figures répondant à des positionnements dramaturgiques forts, et notamment en supprimant les servantes et en ne préservant que les deux rôles féminins centraux : l’infante et Chimène. Deux façons de s’affronter à l’amour et au politique du point de vue de la femme dans une société d’hommes, une société de guerriers. L’information, le commentaire, le sens commun sont portés par un messager-choeur, jouant d’un travail sur le son en connivence avec la pulsation d’une batterie.
La musique, qui tient toujours une place de choix dans les projets de la Compagnie, est ici celle de l’alexandrin sous-tendu par la frappe de la batterie, qui dit le temps, déchire le silence ou accompagne la vibration des mots, scande rageusement la montée en puissance d’un monde en guerre(s).
Le décor veut n’être que mouvement, invention d‘espaces et de vides, maillage du temps qui avance inéluctablement.
Pièce sur les générations et la difficulté de prendre position dans le « monde des grands », le Cid est autant l’histoire de Rodrigue que celle des femmes face à lui : Chimène et l’infante. Un jeune homme et deux jeunes femmes face aux lois sociales, aux codes du pouvoir, de la gloire, de l’honneur, face à l’histoire.
Si Rodrigue et l’Infante font le choix du pouvoir, par raison pour l’une et par un aveuglement sanguinaire pour l’autre (l’innocente détermination ne sort pas indemne d’un assaut meurtrier, ni des injonctions du père), Chimène tente en vain d’imposer un autre discours, celui du sentiment, de la reconnaissance des larmes dans un monde politique où la justice est celle de la raison d’Etat.
Solitude des femmes. Solitude de Chimène. Tout se passe comme si elle refusait jusqu’au bout de jouer la pièce, questionnant les fondements même de la tragédie. Sans doute aurait-elle préféré que Corneille fasse d’elle un personnage de comédie, telle l’Angélique de la Place Royale, répondant au sentiment. Le Cid lui enjoint d’être un personnage politique, mais quelle force a le discours si l’on ne porte pas l’épée ? Comment faire entendre la pleine raison du dilemme ? Point de salut ici, sauf à rester enfermé(e) dans le présent éternel du texte.

Sandrine Anglade

janvier 2013

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