theatre-contemporain.net artcena.fr

Accueil de « La Traversée »

La Traversée

Nacera Belaza ( Chorégraphie )


: Entretien avec Nacera Belaza

Et pourquoi ne pas se laisser porter par des courants d’air ? Ou comment le mouvement, plutôt que de faire chorégraphie peut faire acte de liberté. Et comment une fois débarrassé de la représentation, le mouvement peut enfin nouer état dansant et état spirituel.

Quelles ont été les pistes de travail pour cette nouvelle pièce ?


Ce qui m’a toujours importé au-delà du mouvement chorégraphique en lui-même c’est son pouvoir intrinsèque à affranchir l’être humain, à lui faire dépasser ses soi-disant limites. Le mouvement peut en effet être le vecteur d’une relation forte en lien avec les profondeurs de l’être pour peu qu’on le hisse au-delà des vicissitudes de l’humain. La démarche artistique ce n’est, peut-être, rien d’autre que l’intime quête d’une plus grande liberté.


Quel travail préalable vos interprètes ont-ils dû effectuer ?


Dans mon travail, l’essentiel repose sur le déploiement intérieur de l’interprète, c’est l’endroit même de fondement et de jaillissement d’une pièce ; c’est pourquoi toute scénographie est absente de l’ensemble de mes pièces, le plateau vide représente, à mes yeux, la parfaite scénographie car la chorégraphie c’est l’être en dialogue avec le vide autour, ce vide qui révèle de façon implacable nos résistances, nos peurs. Ce vide infini c’est l’échelle à laquelle tout être doit se mesurer afin de regagner ses pleines dimensions. Ainsi l’interprète doit continuellement dialoguer avec lui-même dans le but de faire céder ses ultimes résistances. Comme si interpréter revenait à ne plus craindre l’insondable vide en soi.


Qu’est-ce qui vous a amené à la danse ?


La nécessité absolue et vitale d’accéder à une plus grande liberté. Ce désir a toujours été proportionnel à l’enfermement dans lequel je pouvais être, cette combinaison de contraires a défini et forgé mon outil principal de travail qu’est la contrainte, toutes mes pièces posent la question récurrente : « Comment est-il possible d’être libre tout en respectant scrupuleusement le cadre prédéfini ? »


À quel moment avez-vous compris que c’était possible, que c’était gagné ?


Je me souviens il y a très longtemps de la remarque d’une spectatrice : « Notre regard ne s’arrête pas à vos corps, ils sont comme des intermédiaires entre nous et une autre dimension. » Alors intimement j’ai su qu’il était possible d’établir un autre type de relation, de dialogue avec le public, de se soustraire à la logique de représentation.


Quand vous parlez de contrainte comme source de liberté, on pense aussi à la foi qui est la vôtre. Qu’est-ce que votre danse doit à votre foi, et inversement ?


Il est toujours délicat de chercher à définir l’ensemble d’un parcours par une donnée aussi intime que la foi, ce que je peux en dire c’est qu’il est évident que la conscience vive d’une forme de transcendance vous amène à regarder autrement pas seulement le corps mais toute réalité. Vous la percevez, la mesurez, en permanence en dialogue avec un infini non visible. Aucune réalité n’est par conséquent « finie », elle se prolonge, résonne sans cesse au-delà de notre champ de perception habituel, et c’est je pense cette conviction qui a donné toute sa résonance à mon art, mais je pourrais tout aussi bien dire que l’art a été une mise en acte, une incarnation de ce cheminement spirituel.

imprimer en PDF - Télécharger en PDF

Ces fonctionnalités sont réservées aux abonnés
Déjà abonné, Je me connecte Voir un exemple Je m'abonne

Ces documents sont à votre disposition pour un usage privé.
Si vous souhaitez utiliser des contenus, vous devez prendre contact avec la structure ou l'auteur qui a mis à disposition le document pour en vérifier les conditions d'utilisation.