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L'Enfant rêve

+ d'infos sur le texte de Hanokh Levin traduit par Laurence Sendrowicz

: Présentation

Un enfant dort sous les yeux de ses parents attendris. La guerre fait irruption, l'entraînant avec sa mère dans la fuite et l'exode. Dans cette pièce du dramaturge israélien Hanokh Levin, humour grinçant et fantaisie cohabitent avec des fragments reconnaissables de l'histoire du XXe siècle, comme en un kaléidoscope terrifiant. Mais s'agit-il du monde ou d'un cauchemar du monde ? Entouré de la troupe du TNS, Stéphane Braunschweig retrouve plusieurs de ses thèmes favoris, comme la présence en l'adulte du regard de l'enfant.




« Ai-je rêvé, ou suis-je éveillé ? N’étaient-ce que visions maladives ce que jusqu’à présent j’ai vu ? Est-elle effacée l’image de Dieu en l’homme ? » se demandait Brand à la fin de la pièce d’Ibsen, au moment de constater l’échec de son projet de « réparer le malheur du monde ». Comme s’il demandait : le monde est-il réellement tel que je l’ai vu, définitivement dégradé et irrécupérable ? Ou bien est-ce moi qui en ai fantasmé la noirceur ? Du monde ou de moi, qui est le plus grand malade ?


L’enfant rêve de Hanokh Levin s’ouvre sur l’image tranquille d’un enfant qui dort ; autour de son lit, ses parents se réjouissent qu’il se soit enfin endormi, presque heureux qu’il repose là comme un mort. En une image simple et quelques mots, Levin a posé là l’existence de tout enfant dans ce qu’elle suscite d’angoisse irréductible pour tout parent : angoisse qu’il meure, angoisse qu’il vive, angoisse de l’avoir mis au monde dans un monde pas fait pour lui.


Et le voilà qui justement surgit dans la chambre silencieuse de l’enfant, ce monde extérieur fait de bruit et de fureur qui évoque aussitôt rafles et pogroms – c’est un groupe de persécutés poursuivis par des soldats persécuteurs. Parmi les premiers, un violoniste ensanglanté s’étonne que la musique n’adoucisse pas les moeurs ; parmi les seconds, une « femme née pour l’amour » commence par s’indigner de la cruauté des soldats, mais ne résiste pas à la jouissance de se venger des yeux encore vierges de l’enfant.


Rêve-t-il ou est-il éveillé, cet enfant dont on s’évertue à tuer l’innocence en humiliant puis en abattant son père sous ses yeux ? Et nous qui savons que la réalité excède parfois en horreur les fantasmes noirs que nous en avons, nous qui ne sommes plus des enfants mais qui rêvons souvent de le redevenir, nous qui sommes tentés de nous fermer les yeux et qui craignons d’ouvrir ceux de nos enfants encore endormis dans le fracas du monde, quel théâtre devrions-nous leur faire pour qu’ils gardent l’appétit de la vie comme du sein de leur mère ?


Au monde tel qu’il est, Hanokh Levin oppose le monde tel qu’il le voit, l’air de dire que celui-ci du moins n’est qu’un rêve, ou qu’un cauchemar si l’on veut. À la violence absurde du monde, il oppose son ironie noire, cinglante et stimulante à la fois, et salutairement nous reconduit vers le quotidien parfois plus rassurant et plus drôle de nos angoisses et de nos interrogations les plus intimes.


Stéphane Braunschweig, 2005

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