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Accueil de « L'Iliade »

: Présentation

Note d'intention


L’envie de monter l’Iliade est née peu après le déclenchement de la crise sanitaire. Cette période a rendu criantes des questions existentielles. Si nous avons semble-t-il fait montre de résilience, nous avons vécu souvent repliés, physiquement et intellectuellement, avec la sensation d’un horizon toujours flou sur lequel nous n’avions aucune prise.


Mais cette crise a surtout agi comme un révélateur. Déjà avant cela, les crises sociales et sociétales nous ont fait comprendre que nous n’étions peut-être pas “aux commandes” de notre destin collectif. Dans les temps que nous avons vécu (et continuons de vivre), ces questions demeurent prégnantes : comment s’accomplir, comment l’Homme s’émancipe, de quelle liberté disposons-nous, que ce soit de façon individuelle ou collective dans un monde où l’avenir paraît sombre ?


Ces questions, les héros de l'Iliade se les posent constamment. Ils sont face à leur cheminement d'humains alors qu’ils n’ont pas de prise sur leur destin. Face aux dieux, immortels, dont les comportements erratiques ont des conséquences directes et terribles sur les humains, ils se retrouvent face à leur finitude. Tout comme nous aujourd’hui, ils doivent composer avec leur_moïra, c’est-à-dire leur part de vie, de bonheur, de malheur, de gloire. Ils doivent apprendre à maîtriser leurs désir, à dompter leur colère. Homère interroge ce qu'on ne peut pas maîtriser en soi, et à l'extérieur de soi.


Bien qu’Homère présente un monde amoral, il ne manque pas d'éthique : il nous parle de l’équilibre et de la limite. Équilibre de l’individu qui cherche à obtenir l’entière réalisation de son humanité. Limite imposée à ce même individu par les barrières de sa condition d’homme, face à son destin. Lorsque Homère nous parle de liberté, il s’agit avant tout d’accord avec soi dans l’action.


Le héros homérique nous apparaît comme un passionné qui se défie de sa passion, s’efforce de la soumettre au principe raisonnable de son âme et de réaliser ainsi, dans tout son être, un équilibre stable.


Ce qui nous a également intéressé, c’est la façon dont le poème reprend les désarrois humains et essaye d’en faire une beauté. Non pas pour dire que la vie est belle, mais pour dire que ce qu’il y a de plus dur dans le grain de la vie, on peut en faire quelque chose de grandiose.


Au fond, avec l’Iliade, Homère nous prouve que ce qui fait la valeur des humanités, c’est qu’elles nous sortent de nous-même et nous mettent en face d’un peuple qui a su résoudre autrement, peut-être aussi bien que nous, le difficile problème de la vie.


Traitement


L’Iliade n’est pas seulement célébration de l’héroïsme, elle invite à penser l’héroïsme. Les héros eux-mêmes savent que le vrai bonheur ne réside pas dans l’affirmation présente de leur excellence héroïque, car leur destin est de connaître la souffrance. Le vrai bonheur des héros est de penser qu’ils resteront dans la mémoire des hommes par le pouvoir du chant poétique.


Ainsi, pour représenter les héros mythologiques, nous nous sommes naturellement intéressés au monde du sport collectif de haut niveau. Les guerriers sur le champ de bataille se colorent ainsi de ce qui fait l’univers des sports de type rugby ou football américain : il revêtent ainsi les costumes de ces “guerriers modernes”, épaulières, plastrons, casques, avec des maillots sur lesquels les noms “Achille”, “Ajax” ou “Hector” sont floqués en grand. Les maquillages, les accessoires, les ambiances sonores de stade dans lesquels on retrouve la grandeur et la folie colorent les scènes et élèvent les enjeux. La quête de la victoire sportive s’apparente à la quête d’absolu individuel, autant que collectif. Avec, comme chez Homère, une éthique, symbolisée par l’éthique contemporaine du jeu.


L’épopée est également le creuset d’une véritable mélancolie, d’une intimité familiale, qui lui confère sa beauté la plus profonde. C’est ainsi que les héros passent beaucoup de temps dans des endroits intimes, que nous avons choisi de symboliser par cet espace juste avant le combat : le vestiaire. C’est dans cet espace familier mais également juste au bord de l’action, que les héros vont vivre leurs bouleversements internes. Enfin, une radio, objet iconique pour rapporter les “faits” sportifs, mais également objet permettant de développer un imaginaire puissant, sera l’objet de relation entre cette intimité et la violence rapportée du champ de bataille.


Les dieux quant à eux, par l’inconséquence de leurs décisions, par leur comportement adolescent, nous ont semblé parfaitement être représentés par ceux que l’on appelle communément les “1%.” Cette fraction de la population la plus riche du monde, dont les choix déraisonnables et bien souvent absurdes, peuvent bouleverser des centaines de milliers de vies humaines.

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