Trois femmes, trois générations et le poids d’une mémoire à la fois silencieuse et assourdissante. La fille ne veut qu’une chose : en savoir toujours plus. La mère ne veut pas parler : il faut oublier. La grand-mère se dérobe : le passé c’est le passé, il faut regarder vers l’avenir. Avec El País sin duelo, Cristian Flores et sa compagnie Los Barbudos, sondent les gouffres de silence de leur pays, le Chili, confronté à cet héritage invisible et écrasant : la lourde mémoire des femmes persécutées sous la dictature militaire. Après plusieurs mois d’enquête, s’entrouvre le livre clos où voisinent victimes et bourreaux, commencent à résonner les récits de tortures, de sévices sexuels subis dans les centres de détention. Et se fait plus douloureuse cette blessure transmise dans le secret des familles, de mère en fille, de génération en génération depuis plus de cinquante ans. Ce spectacle dans un «pays sans deuil» explore ce récit troué, cette dissimulation des faits, cette anesthésie des souffrances. Fille, mère, grand-mère, chacune vit à sa manière le lourd héritage des blessures passées sous silence. Avec cette cinquième pièce du Teatro Los Barbudos, Cristian Flores poursuit son remarquable travail documentaire dans un pays où la mémoire collective est toujours à demi-étouffée sous la chape du silence.