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D'autres le giflèrent

Alexandra Lacroix ( Mise en scène ) , Christophe Grapperon ( Direction musicale )


: Intentions

La scène


De même que les évangélistes se sont adressés à des communautés différentes et ont révélé plusieurs facettes de Jésus et de sa Passion, Bach a su trouver un langage et une inspiration musicale propres à chacun des évangiles. De même, nous nous attachons à mettre à jour la richesse du texte et de la musique en rapprochant les versions pour mieux révéler leurs complémentarités et permettre au spectateur de se les approprier.


C’est un travail de laboratoire dans lequel nous explorons en profondeur le thème de l’humiliation dans ces différentes versions de la Passion du Christ. Cette thématique nous parle de souffrance, d’épuisement, de stigmatisation, d’abandon, de confrontation, de rabaissement, d’épreuve, de blessures... Nous plongeons dans une recherche charnelle et sensorielle, dans l’exploration de l’humanité qui ressort de ces oeuvres sacrées, dans l’empathie pour «le fils de l’Homme» et le parcours qu’il a subi.
Nous la mettons en regard de situations d’aujourd’hui.


Il y a les gifles, la couronne d’épines, les crachats, le déshabillage, le partage du manteau, le procès, le peuple qui crache sa haine et montre du doigt, la flagellation, les chutes à terre, l’éponge de vinaigre, le mépris, l’association avec les larrons, l’écriteau...
On pense au parcours d’un condamné de Victor Hugo, au rôle de la société dans la désignation des coupables et l’avilissement d’une personne.


Dans la tradition religieuse, le chrétien tente de communier avec les souffrances de Jésus en suivant son chemin de croix, devant 14 tableaux qui commémorent son parcours de souffrance et d’humiliation.


D’un point de vue artistique, beaucoup d’intérêt a été montré au cours des siècles pour l’analyse, la conservation et la restauration des images iconographiques associées à cette pratique : elles sont considérées comme faisant partie de la production thématique inspirée par la crucifixion.


14 stations, 14 épisodes, 11 situations, 3 chutes


Nous partons de ce principe du chemin de croix pour suivre le parcours d’humiliation qui mène à la crucifixion. Dans les 14 épisodes/stations de notre découpage, Chacun des intreprètes prend à tour de rôle la place centrale de l’humilié, s’identifiant à Jésus, accompagné et observé par ses congénères et le public. Chacun traverse une situation humiliante en lien avec le chemin de croix établi à partir des épisodes choisis par Bach et évolue dans l’espace restreint du tableau pour vivre et transmettre l’humiliation intrinsèque à la partie jouée. Chaque interprète est considéré scéniquement et musicalement comme un soliste et placé au centre du tableau pour incarner Jésus. Les épisodes sont transposés dans une situation d’humiliation contemporaine pour permettre au public de mieux se projeter dans le tableau et s’identifier à son tour.


Un Choeur amateur pourrait être intégré dans le public pour chanter les chorals, nous englober, nous aider à plonger dans le tableau et à intérioriser les situations.


Les stations sont encadrées par un espace/tableau qui se déplace, joue avec les hauteurs, prend du relief et de la profondeur à chaque passage dans un nouvel épisode.


Aujourd’hui, mettre en perspective ce parcours réel, fantasmé, mythifié, base de croyances ancestrales mis en musique par Bach dans une sensibilité propre à chaque évangile, c’est le questionner, tenter d’en faire resurgir toute la substance humaine et spirituelle et l’offrir à un vaste public.


La Musique


Porter la musique de Bach sur un plateau de théâtre est l’occasion de nous interroger sur l’incarnation de cette musique, sur nos corps musiciens entrant en action pour la faire sonner. Pour véritablement mettre en chair cette lecture de l’humiliation, nous avons besoin dans la musique comme au plateau de chercher de nouvelles couleurs, de nouvelles textures. Nous avons besoin d’explorer la musique de Bach à un par voix pour que chacun soit pleinement maître de sa ligne et cherche le sens propre qu’il veut y mettre en ayant une conscience globale de l’harmonie. C’est l’art du contrepoint si cher à un Bach qui pense chaque voix dans un tout harmonique mais lui donne toujours une cohérence mélodique que nous devons chercher à rendre audible pour faire entendre toute la richesse de sa musique.


Pour rendre cette « polyphonie de solistes », nous avons réuni une équipe de chanteurs et d’instrumentistes fin chambristes. Chacun a une culture profonde de ce qu’est la musique d’ensemble et sait se mettre au service de la recherche d’une homogénéité de son et, en même temps, chacun a le tempérament et les moyens artistiques de faire entendre sa propre voix dans ce tout englobant qui n’écrase pas les individualités. Tous sont rompus à l’exercice du « un par voix » et s’y livrent régulièrement dans les plus prestigieux ensemble instrumentaux et vocaux (Les Arts Florissants, Le Concert d’Astrée, Accentus, La Chapelle rhénane, Akadémia, Ensemble Mattheus…).


Amener Bach sur la scène c’est aussi remettre sa musique au coeur des enjeux dramaturgiques qui lui étaient si chers. C’est remettre sur le métier les liens profonds qu’il tisse entre le texte et la musique. Bach ne fait pas porter par la même musique une foule réclamant la crucifixion ou des soldats s’amusant à humilier le Christ. Il ne traite pas non plus un épisode avec les mêmes procédés et la même sensibilité selon l’évangile qu’il choisit d’illustrer.


Notre découpage fait entendre des extraits choisis des trois Passions de Bach. Chacune a ses spécificités : la Passion selon Saint Marc dont la musique des récitatifs n’a pas été retrouvée et dont les récits seront repris en français est un lieu de rencontre du théâtre et de la musique, la Passion selon Saint Matthieu avec ses nombreux airs de commentaires est pour nous une passion de l’intime, de la réflexion, la Passion selon Saint Jean aux turbae incisives fait sonner avec force les enjeux dramatiques que Bach convoque dans sa musique. Nous puisons dans cette matière riche pour construire une nouvelle oeuvre avec sa dramaturgie propre, un chemin de croix mettant en évidence les humiliations subies par un dieu fait homme.

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