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Contrôle d'identité

+ d'infos sur le texte de Alexandra Badea
mise en scène Alexandra Badea

: Avant propos

Les vagues invisibles

C'est au croisement de ma biographie et de l'état du monde dont je suis le témoin engagé que mes questionnements se déploient...


En effet, enfant, je ne cessais de fouiller dans les archives familiales espérant déterrer quelques racines étrangères dans ma généalogie. Je voulais trouver quelque part un étrange(r) qui s’immiscerait et viendrait troubler toute cette pureté roumaine administrée. Pour affirmer, peut-être, une différence, la mienne. Et m'arracher ainsi à l'endoctrinement idéologique. A l'absence de réflexion. A l'incapacité de juger. A la perte du sens commun. A la non-pensée systématisée. Sans doute la tentation inconsciente de singulariser mon rapport au monde et aux autres. J’avais dix ans lorsque la dictature communiste est tombée. Un régime politique autoritaire et hégémonique. Un système institutionnel de domination totale. Totalitarisme. Massification. Nationalisme. Nous étions tous semblables. Nous étions roumains. Nous étions les meilleurs. Nous étions made in Romania. Je voulais y échapper. Cette quête absolue de n'être que moi-même, ce besoin d'être pressant ne cessaient de me tarauder. Des garde-fous pour échapper peut-être enfin à ce sentiment d'insécurité identitaire devenu symptomatique. Et me sauver.


Adolescente, je me demandais souvent naïvement pourquoi personne ne m’avait demandé où j’avais envie de naître. Oui, de naître et non de vivre. Parce qu'on n'a de cesse de nous répéter que nous devons transmettre l’histoire de notre famille et de notre peuple que nous portons en nous. Et parce que tout commence là où nous naissons. Notre état civil (comme notre sexe) est le fondement même de notre identité. Une identité manifeste et conséquente, qui du point de vue culturel, social, économique et politique, attribue à chacun d'entre nous des droits et obligations bien précis. Des tampons, des cachets et des timbres... Des invariantes.
Celles qui pré-existent. Et une identité qui nous détermine et nous fige.


Aujourd'hui, je suis de ceux et celles qui ont passé la ligne. J'ai choisi de vivre ailleurs. Mais passer la ligne, c'est se heurter au même sentiment d'insécurité identitaire. C'est être de partout et de nulle part. Alors surgissent les mêmes interrogations. Qui suis-je ? Comment puis-je m'arracher à la confusion commune pour être libre et authentique ?


A l'heure des nationalismes exacerbés, de la globalisation de la terreur et de l'idéologie, des guerres incessantes au Proche-Orient, du surarmement nucléaire, du racisme, de l'antisémitisme, du déracinement et des migrations de populations entières, du droit du sol et du droit du sang, de l'asservissement à l'économie, de la culture et des loisirs de masse, de l'achèvement de l'idée de communauté, la question, les questions de(s) identité(s) doivent être plus que jamais les nôtres. Il est plus que jamais nécessaire d'interroger la société à partir du regard que porte sur elle, celui ou celle qui s'en sent exclu(e) à partir d'évènements, de récits et d'expériences de vie. Cette approche critique est essentielle pour creuser les vagues invisibles et imposer notre propre regard pour qu'il n'appartienne qu'à nous.


Des paroles libérées par milliers pour rassembler et réconcilier.


Rédaction des textes Sylvia Botella en collaboration avec Alexandra Badea

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