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: Entretien avec Marcial Di Fonzo Bo

Réalisé par Maïa Bouteillet (Centre National du Livre - 11/12/2000).


Maïa Bouteillet : Bon, ma première question c'est : je voudrais que tu me dises, comment tu as trouvé les écritures de " Copi", parce qu'il me semble qu'il y a beaucoup de ressemblances entre ta biographie et la sienne.


Marcial Di Fonzo Bo : oui y il a des ressemblances et paradoxalement j'ai connu "Copi" en France, et moi je ne connaissais pas du tout son existence , parce que en Argentine il est pas connu, et ses écritures et ses livres sont interdits là-bas et aussi dans toute l'Amérique latine et cela fait des années et c'est pour ça qu'on ne trouve pas de ses ouvrages là-bas , ni des traductions non plus, parce que la plus part de ses écritures sont en français et ont été publiés en France et pareil pour ses dessins , et bien j'ai connu "Copi" en France, même ici avec difficulté parce qu'aujourd'hui et ces dernières années on trouve comme un mouvement de renouveau dans l'œuvre de "Copi", mais dix ans en arrière on ne trouvait pas beaucoup ce phénomène. J'ai commencé avec "El Uruguayo " qui est la première nouvelle de "Copi" qui fait partie du spectacle d'aujourd'hui aussi, et c'est la lettre que je lis au début de la pièce. Et comme ça petit à petit je faisais ça pour m'amuser, comme un amateur et pendant des années j'ai commencé a chercher un livre, après j'en ai trouvé un autre et un autre jusqu'a trouver ses nouvelles. Et il y a beaucoup de ses œuvres qu’on ne connaît pas et qu'il faudra rééditer , même en France.


Maïa Bouteillet : Tu m'avais dis que tu avais presque appris le Français avec ses ouvrages.


Marcial Di Fonzo Bo : Non, non ce n'est pas que j'ai appris le français avec ses nouvelles, c'est seulement le premier livre que j'ai lu en français , oui, oui, mais c'est comme une anecdote, j'ai pas appris le français avec "Copi", mais c'est un des premiers livres que j'ai lus en français, absolument.


Maïa Bouteillet : Comment est né le projet de faire un portrait de " Copi" ?


Marcial Di Fonzo Bo : Le projet commence à Barcelone, ça fait un moment, courrnt de l'année 98, cela fait deux ans, parce que le Festival "Le Grec" de Barcelone m’a demandé de faire un spectacle, et on finissait de jouer "Ricardo III" avec la mise en scène de Matias Langlof l'été dernier et celle et le suivant, et c'est comme ça qu'on ma proposé le projet, et aussi pour le fait que je travaille pour la Compagnie de Théâtre les Lucioles et pour laquelle je travaille depuis déjà dix ans, avec eux on avait fait de projets similaires à la prison de femmes de la ville de Rennes avec Jean Genet, on jouait avec toutes ces femmes pendant un an tout un spectacle de toutes, toutes les œuvres de Jean Gnet, parce qu'elles voulaient travailler avec ses pièces, on avait joué aussi quelques textes de Leslie Kaplan avec ces mêmes femmes l'année d'avant. Et bon, un peu la particularité de la compagnie c'est de ne jamais faire un spectacle à partir de texte théâtral unique, ce n'est pas une loi pour nous, mais où on fait une adaptation d'une nouvelle où on travaille sur l'auteur et ces œuvres en général par exemple 'Le poids du monde" de Peter Handke qui est un journal. Et bon, le fait d'aborder "Copi" était un peu comme la continuité de notre travail, et là on a commencé, sans savoir non plus ce qu'on voulait monter, on a travaillé sur tout ses textes, on les a montés, trouvés, montés sur la scène, trouvé des textes adjacents, toute sa correspondance, les gens qui on parlé de "Copi", et à partir de ce moment là, tout ça nous a conduits a trouver une forme théâtrale, un style qui pourrait correspondre a son esprit, et surtout…


Maïa Bouteillet : C'est un hommage ?


Marcial Di Fonzo Bo : non, ce n'est pas un hommage, l'hommage est mort, mais par contre l'écriture de "Copi" est très vivante. L'idée était de trouver 30 ans plus tard un style, parce que "Copi" évolue dans les années 70, en cherchant des formes théâtrales, et il a écrit des nouvelles et des pièces très différentes et ses dessins sont très importants dans son œuvre, et à part ça, c'est qu'il a été, un personnage social très particulier, très atypique, et important, un grand intellectuel qui s'est mit au service de son image, et qui joue avec, comme un provocateur... c'etait un provocateur...


Maïa Bouteillet : Un subversif ?


Marcial Di Fonzo Bo : ... un subversif qui dit préférer les dessins aux bombes, comme il disait. On a commence a travailler en cherchant une forme théâtrale qui pourrait renfermer tout son esprit, et c'est comme ça qu'est venue l'idée de faire un portrait de "Copi", un portrait comment dire..., c'est ne pas UN portrait, c'est une galerie de portraits, un portrait de plusieurs facettes, l'idée c'était pas de faire un simple portrait, mais l'important c'est...


Maïa Bouteillet : C'est comme un voyage dans son œuvre ?


Marcial Di Fonzo Bo : ... oui c'est cela, c'est un voyage dans son œuvre, à partir de là on a trouvé un texte qui nous a beaucoup aidé, qui s'appelle " Rio de la Plata" qui est la préface d'une nouvelle que "Copi" n'a jamais écrite, et qui parle beaucoup de sa vie, de sexe, de son père, et de son exil, dans cette œuvre on trouve la colonne dorsale, comme un fil rouge qui nous guide dans cette folie , non.


Maïa Bouteillet : Il est encore inconnu en Amérique latine ?


Marcial Di Fonzo Bo : Justement, il y a surtout un grand intérêt, parce qu'il n'est connu qu'un peu, mais pas du grand public, surtout parmi les intellectuels, les gens du théâtre, les acteurs, il y a un véritable manque de traductions, et c'est pour ça qu'il y a une grande, grande expectative pour mon voyage du mois de juillet pour préparer la tournée, j'ai trouvé des acteurs très intéressés.


Maïa Bouteillet : Et "Eva Peron" fut traduite en espagnol seulement l'année dernière ?


Marcial Di Fonzo Bo : Non, c'est cette année, en avril de l'année 2000.


Maïa Bouteillet : Et pas avant ?


Marcial Di Fonzo Bo : Non, non parce que là-bas Eva Peron continue à être comme un tabou, quelque chose de difficile. Mais c'est un peu l'œuvre de "Copi" qui fit un scandale dès sa sortie, c'est a partir de cette œuvre là qui était un peu interdite, mais il n’était pas interdit à proprement dit, ni exilé politique non plus, parce qu'aucun éditeur n'a voulu éditer aucun de ses livres pendant 20 années, mais il n'y a pas de décret d'exil pour lui, dans le sens politique, à la suite de ce texte qui fut écrit en 1969 que s'est produit cet exile volontaire.
Et bien , comment va-t-on au Chili maintenant, il m'a paru important de faire circuler ce texte au Chili, cet une traduction en "argentin" faite cette année et le nom du traducteur je suis incapable de le dire - il n'est pas très bon et comme on joue au "Teatro Amil" dans le cadre du "Festival del mes de Enero" a Santiago du Chili , cela me semblait important de faire une lecture du texte avec des acteurs chiliens et dans le spectacle aussi il y a un passage d' "Eva Peron", un portrait qui dure environ 10 minutes.


Maïa Bouteillet : Tu as un projet pour diriger "Eva Peron" ?


Marcial Di Fonzo Bo : On va voir, Carmen Romero qui dirige le Festival est très enthousiasmée par l'idée, et bien je vais trouver les acteurs le 8 janvier a Santiago et on fera une lecture du texte, et à partir de cette première rencontre on verra si ce projet arrive à quelque chose de concret. Aussi nous avons le projet de faire venir éventuellement l'équipe chilienne en France pour la saison 2001-2002, tout est entre guillemets en attente, on va voir si on le fait ou non, peut être. Mais j'essaie de travailler comme ça, parce qu'il y a deux réalités : au théâtre ici en France on prépare avec deux années a l'avance les pièces et en Amérique du Sud c'est différent on décide les choses d'une façon plus improvisée, en même temps j'ai des projets de ciné et on verra bien, je crois beaucoup en ça, si c'est fait , c'est fait, si ce n'est pas fait, ce n'est pas fait.


Maïa Bouteillet : Comment tu trouves la situation du théâtre là-bas ?


Marcial Di Fonzo Bo : La situation en général, ou ....


Maïa Bouteillet : La situation plutôt au Chili.


Marcial Di Fonzo Bo : J'étais très surpris et j'ai aimé, parce qu'au Chili il y a un niveau intellectuel impressionnant et surtout quelque chose qui est très fort, c'est que pendant les années de dictature du Général Pinochet, le théâtre fut l'un des seuls endroits qui n'était pas interdit, les gens pouvaient continuer d'y aller, je ne parle pas des grands théâtres classiques, je parle plus du théâtre marginal, du théâtre d'auteur, plus contemporain, c'était toujours un endroit ou l'on pouvait parler, discuter, et il se passait des choses, parallèlement les acteurs ils étaient persécutés, la plupart d'entre eux pour leurs participations dans des manifestations contre le régime, mais pas dans les théâtres. Ce qui fait qu'aujourd'hui avec les nouvelles générations, les personnes qui ont entre 25 et 30 ans, surtout les adolescents de 15 à 20 ans, vont beaucoup plus au théâtre parce que c'est toujours un endroit ou l'on peut parler et penser différemment des autres, c'est comme la musique en Europe, pour dire qu'on est pas d'accord avec le reste, et ça donne un public très très jeune qui va au théâtre, et les salles sont pleines de gens jeunes, qui viennent regarder et écouter, et quand tu viens ici, que tu vois dans une salle remplie de vieux, des abonnés, des bourgeois...


Maïa Bouteillet : Des invités ...


Marcial Di Fonzo Bo : ... des invités, ce sont des gens qui font leur travail. Mais là-bas le travail est déjà fait, c'est très fort et ça donne une vitalité au théâtre, c'est impressionnant, et en même temps on trouve des auteurs très très jeunes, ils sont si nombreux que je n'ai pu les trouver tous, je n'en ai trouvé que quelques uns et j'ai regardé leurs travail qui sont d'une qualité exceptionnelle, sans ressources, sans argent, ils ont un bon niveau. Je suis allé au Conservatoire pour y voir les plus jeunes , des gens qui avaient 20 ans, de voir le travail qu'ils font, j'ai été complètement impressionné, très très fort, j'ai aimé.


Maïa Bouteillet : Et bien , a-t-on publié ces jeunes auteurs ?


Marcial Di Fonzo Bo : La publication en Amérique du Sud est un problème, c'est un désastre que de publier là-bas, non, non, mais ils ont fait quelques avancées, mais en général c'est un désastre, non, non, difficile.


Maïa Bouteillet : Que penses-tu de retourner là-bas pour travailler, c'est la première fois non ?


Marcial Di Fonzo Bo : Non, ce n'est pas la première fois, j'ai déjà été avec Mathias Langoff avec un autre spectacle "Kafka", on a joué "La Colonia Penitenciaria" au "Festival Internacional de Buenos Aires" ça fait deux ou trois ans, c'était la première fois que j'y allais. Et à mon avis c'est absolument évident avec le spectacle, avec cet spectacle, parce que faire "Copi" ici en France, travailler le spectacle, que parle beaucoup de l'exil, je crois que c'est absolument évident, et c'est comme un geste très simple de retourner et amener "Copi" là-bas et laisser ses publications , et travailler avec ses textes en espagnol, je pense que c'est fabuleux.


Maïa Bouteillet : Et demain tu t'en vas ?


Marcial Di Fonzo Bo : Oui, demain, demain soir on s’en va, et on joue... je peux dire les dates ?, on joue le 16 décembre au "Teatro Coliseo Podesta" de la Plata, le 21 décembre au "Teatro el Galpon" à Montevideo, et du 4 au 8 janvier au "Teatro Amil" à Santiago du Chili.


Maïa Bouteillet : Merci.


Marcial Di Fonzo Bo : De rien.

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