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The BFG (Le Bien Formidable Géant)

+ d'infos sur le texte de Roald Dahl traduit par Laure Bonnet
mise en scène Laure Bonnet

: Histoire de la création

par Laure Bonnet

Après la création de Sorcières d'après Roald Dahl, spectacle de marionnettes mis en scène par Sylvain Maurice, le Nouveau Théâtre de Besançon m'a proposé de continuer l'exploration de l'oeuvre de Roald Dahl à travers une petite forme très légère (une comédienne, un accompagnateur, une voiture). Défi que j'ai relevé en choisissant de travailler sur The BFG, paru chez Gallimard sous le titre Le Bon Gros Géant.


Les textes de Roald Dahl m’ont accompagnée tandis que je grandissais. Quelques fois par an, on nous lavait, on nous frottait, on nous shampouinait, on nous décollait la crasse sous les ongles, on nous habillait de propre, on tâchait à coup de brosse de démêler nos longues tignasses, et une fois les cinq enfants présentables, on nous entassait dans la Renault 11 et nous “sortions”. Nos “sorties” étaient exceptionnelles. On quittait la ferme par la routelette minuscule et, après sept cents mètres de dénivelé en virages, où en général l’un ou l’autre (moi le plus souvent) vomissions, nous nous dirigions vers le bourg d’Aubenas, souspréfecture de l’Ardèche, onze mille habitants à l’époque, le tourbillon de la vie citadine ! On nous traînait au long des jalons de ces matinées : le médecin, le marchand de chaussures, la maison de régime et ses éternels biscuits aux raisins secs sans sel, sans gras, et sans sucre, et enfin, toujours à la fin, arrivait le moment que j’attendais : la librairie. Le budget familial a toujours été très serré, mais la librairie était la dépense sur laquelle ma mère était la moins regardante. Il me semble que j’avais droit à une petite dizaine de livres de poche. Le choix des titres m’était laissé à mon entière liberté. C’est dans ces circonstances que j’ai découvert Roald Dahl. Entre huit et douze ans, j’ai lu toutes les parutions en français de cet écrivain génial. Et quand je dis “lire”, ce n’est pas une fois en passant, mais une bonne douzaine de fois chacun. Parce que je disposais de peu de livres au regard de la faim que j’en avais, et ceux-là résistaient aux relectures sans fin. Je ne peux rien dire de mon rapport à Roald Dahl sans parler de l’enfant que j’étais. Comme vous l’aurez peut-être compris, mes parents, au début des années 80, ont fait des choix de vie radicaux, écologiques.


De tous les livres de Roald Dahl, celui-ci était son préféré. Il avait inventé cette histoire pour ses enfants, et une fois couchés, il n'hésitait pas à faire le tour du jardin et à passer une canne de bambou entre les rideaux de leur chambre pour leur faire croire à la présence du géant souffleur de rêve (Roald Dahl était très très grand). Il l'a truffé de mots inventés et de fautes de grammaire. C'est également l'unique fois dans son oeuvre qu'il donne au personnage principal le prénom d'un proche : celui de sa grand-mère, Sophie. Le livre est dédicacé à sa petite fille Olivia, morte de la rougeole le 17 novembre 1962, à l'âge de sept ans. J'ai examiné les dates de parutions des oeuvres de Roald Dahl et j'ai constaté que presque tous ses textes pour enfants sont postérieurs à 1962, (à commencer par l'immense Charlie et la Chocolaterie paru en 1964). C'est une pensée qui a imprégné mon travail de répétition. Cette observation a forgé en moi l'intime conviction que Roald Dahl n'a jamais rien fait d'autre qu'écrire pour sa fille disparue, tissant avec elle un lien entre les mondes réels et imaginaires.

Laure Bonnet

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