theatre-contemporain.net artcena.fr

Par le Boudu

mise en scène Bonaventure Gacon

: Le Spectacle

Bonaventure Gacon joue un Auguste loqueteux et provoquant. Le Boudu est une épave. Un clown méchant et qui le revendique. Mais c’est en endossant toute l’horreur du monde que le personnage de Bonaventure Gacon libère le rire. Gueule tordue, barbe foisonnante, le Boudu entre en scène, dépenaillé, fourbu, plus instable qu’une coquille de noix dans la tempête. Regardez un peu ses grands yeux lunaires, la misérable calotte de feutre gris qu’il porte sur la tête, sa souquenille, ses basques, ses pantoufles et son nez rouges. Vous l’avez compris, le Boudu est un clown qui s’appelle le Boudu. Pas un de ces clowns blancs, tyranniques et vaniteux, mais un Auguste un pauvre type, une épave. À grand peine, il s’approche d’une table de bois cent fois sauvée de la décharge publique, cent fois rafistolée. Va-t-il enfin parler ? Finalement oui, il parle. Ses mots sont pleins de trous, de vent et de honte : « C’est moi qui suis là ! (long silence), Moi, j’suis méchant... (long silence), j’suis méchant (silence) moi ! » Voilà, c’est dit.
Jamais sans doute avant ce Boudu, un Auguste n’aurait osé se risquer sur la piste ou un plateau avec un tel aveu. Il aurait dit à la rigueur : j’suis con, j’suis moche, j’suis nul... Des choses dans ce genre. J’suis méchant, ça non ! Mais il y a pire encore. Cette histoire d’une petite fille qu’il prétend avoir enfermée dans une grotte : « Elle appelle un petit peu sa maman, y fait froid, j’aime ça (long silence) moi... Pi après, j’la bouffe, la fille, c’est moi qu’est l’méchant ! » Avec cette entrée en piste pas très ordinaire, le Boudu vient de se débarrasser du plus âpre, du plus cru de son personnage. Il l’a jeté comme on jette un sort ou comme on lance un défi. Après ça, est-ce que vous m’aimerez quand même ? S’il ne le dit pas, tout son personnage l’implore. Le Boudu est un bouc émissaire. Nos horreurs, nos erreurs, nos grandeurs, tout, il porte absolument tout sur ses larges épaules. En nous débarrassant du pire, il nous rend le meilleur de nous-même : le rire. Peut-être qu’un clown, ce n’est pas plus compliqué que ça.


Extrait du dossier pédagogique réalisé par Viviane Sanchez, Professeur-relais du jumelage, et Magalie Crouzet, chargée du secteur éducatif de l’Hexagone Scène nationale de Meylan.

imprimer en PDF - Télécharger en PDF

Ces fonctionnalités sont réservées aux abonnés
Déjà abonné, Je me connecte Voir un exemple Je m'abonne

Ces documents sont à votre disposition pour un usage privé.
Si vous souhaitez utiliser des contenus, vous devez prendre contact avec la structure ou l'auteur qui a mis à disposition le document pour en vérifier les conditions d'utilisation.