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Madame Ka

+ d'infos sur le texte de Noëlle Renaude
mise en scène Florence Giorgetti

: Le Metteur-en-scène

Comment raconter cette Madame Ka là ?


Madame Ka ou les illusions perdues…
Madame Ka fait le trajet vers le désenchantement.
Comment Madame Ka voudrait se défaire de ses préjugés, pourquoi déteste-t-elle tant les chauves ou ceux qui veulent faire croire qu'ils sont chauves ?
Comment Madame Ka aime à philosopher dans sa cuisine après minuit avec son neveu Benjamin, à cette heure tardive elle aime tirer les plans de la comète, elle se souvient petite qu'on lui recommandait " Sois heureuse. " mais depuis elle a oublié la recette, elle en a même oublié le goût, elle en a gardé les aigreurs.
Le temps est devenu comme un sommeil dont il faut s'éveiller à chaque instant. En attendant qu'il passe, elle découpe des journaux,
des articles sur la faune, la flore…; elle s'asphyxie doucement…
Comment raconter son entêtement pour l' "arythmétique" de sa vie? D'elle-même, elle se " refait " ou se " recale ", le paradis pour elle a toutes les structures de l'institution scolaire, rappel nostalgique de l'enfance de Madame Ka peut-être?
Madame Ka est à sa manière une héroïne de Tchekhov. Ce qui compte chez elle n'est pas ce qui lui arrive, mais ce qui ne lui arrive pas. Elle est dans la nostalgie, le ressassement, elle n'arrive plus à déglutir…
Elle ne capte ni le bonheur, ni le malheur, elle se voit mal un jour captant quelque chose…
Elle est drôle Madame Ka, elle est chiante Madame Ka, mais c'est cette Madame Ka là.


Note sur un compagnonnage…


Depuis longtemps, Noëlle Renaude et moi, nous nous accompagnons.
Un accompagnement de longue date qui commence en 1991 avec Divertissements touristiques, mis en scène par Robert Cantarella à la maison de la Culture d'Amiens, sous le regard attentif d'Alex Broutard. Puis en 1993, à Théâtre ouvert, avec le Renard du Nord, toujours mis en scène par Robert Cantarella. Mon personnage s'appelait Mme Khun, un personnage et il me joua bien des tours…
Ce personnage, pour moi très inspiré d'un conte, je l'imaginai un peu comme la princesse aux petits pois… Longtemps après la fin des représentations, il me poursuivit avec ses pantoufles à la Cendrillon, si bien qu'une nuit Mme Khun me retrouva dans mon sommeil, vêtue de sa robe jaune en abat-jour qui ne pouvait pas se plier parce qu'elle était faite comme un abat-jour. Mme Khun était condamnée à rester debout pour l'éternité, dans sa boîte à accessoire, au fond d'une salle de répétition. Comme Alice au pays des merveilles, elle s'allongeait comme un grand télescope et se penchait sur moi pour que je la délivre, comme Alice, elle grignotait des morceaux de champignons.
Je me réveillai et sous le choc, demandai à Noëlle de délivrer Mme Khun en la faisant revivre. Je proposai à Noëlle de partir d'un itinéraire, par exemple des heures passées par Mme Khun dans une journée. Qu'est-ce qui lui arrive? Qui rencontre-t-elle?
L'imaginer comme contenue dans un croquis, dans une bande-dessinée. Comme Alice, Mme Khun croiserait des créatures variées, absurdes et loquaces dans des espaces perdus… J'ai la nostalgie des titres de mon enfance: Lili à la campagne, Lili au cirque, Lili fait du vélo, ainsi pouvait-il en être de Mme Khun.
Noëlle Renaude écouta… Puis Mme Khun devint Mme Ka.
Dans un premier temps, Madame Ka fut enregistrée à France Culture, une toute petite partie, qui fut très bien reçue. Lucien Attoun fut convaincu tout de suite par la présence de Madame Ka. Il nous encouragea et proposa un chantier à Théâtre ouvert que Robert Cantarella dirigea en janvier 1999.
Confiance, enthousiasme suscités de toute part confirma en moi l'état d'urgence de mener Madame Ka sur mes plates-bandes.
Madame Ka, c'est l'histoire d'une femme qui n'a plus d'histoires et qui en fait toute une histoire. Elle n'en a que les chutes, elle les met en boucle, elle les met en scène comme des collages, des vignettes, elle se met à l'intérieur de l'image et elle en devient l'héroïne. Elle va de stations en stations comme un chemin de croix qui se voudrait désopilant.
C'est avec cette Madame Ka là que j'ai choisi de questionner le théâtre. Il y a dans le texte de Noëlle Renaude toutes les formes possibles à venir dans le théâtre, elle casse les codes, les sentiments de jeu, le réalisme, pour en faire un véritable espace à rêver. C'est un théâtre dont je rêvais, un théâtre en liberté avec des acteurs en liberté. Un théâtre qui reste une énigme vivante.

Florence Giorgetti

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