Christophe Pellet, dans ce texte, se transforme en grand pourfendeur de la culture française, par l'entremise de son personnage, Thomas Blanguernon. De la culture, mais aussi de l'État français, de l'esprit français et des spécialités culinaires françaises. Bref. De tout ce qui est français. Dans ce long monologue, qui ressemble plus à un pamphlet qu'à une pièce de théâtre, le personnage de Blanguernon se raconte, se confie, dit ses désirs et ses désillusions et, comme lors d'un incendie (le grand incendie social, politique et culturel contemporain), cherche la sortie de secours.

Thomas Blanguernon, c'est lui, Pellet. Mais Thomas Blanguernon, c'est aussi tous les auteurs dramatiques, tous les individus de la société française. Thomas Blanguernon c'est moi, c'est vous. Ce que comprend Blanguernon, au fur et à mesure de sa diatribe, c'est que ce qu'il appelle la « catastrophe française » est avant tout une catastrophe individuelle. Comme la plupart des grands idéalistes, il souhaite changer l'individu en profondeur, l'élever et rêve, à terme, d'une société plus juste et plus belle. Et comme la plupart des grands idéalistes, il finit par se rendre compte qu'il ne peut rien changer. Qu'il n'est pas meilleur que les autres, loin de là, et que la seule solution pour sortir de ce circuit infernal, dans lequel tout, toujours, se reproduit de la même manière, c'est de disparaître. De se supprimer soi-même.
Alors ? Aveu d'un échec cuisant ou courage exemplaire né d'une lucidité et d'une droiture hors-norme ? Pellet laisse le spectateur seul juge.
A la fois pessimiste et humoristique, désespérante et incroyablement drôle, sombre et joyeuse, La Conférence est un joyau de cynisme, de réalisme et de poésie. Et une tentative, peut-être un peu désespérée, de provoquer une prise de conscience. Du moins a-t-elle le mérite d'en tenter l'expérience.