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La Chevauchée sur le lac de Constance

+ d'infos sur le texte de Peter Handke traduit par Marie-Louise Audiberti
mise en scène Pierre Maillet

: La chevauchée sur le Lac de Constance

Par Claus Peymann

La pièce La chevauchée sur le Lac de constance, fait du théâtre son thème exclusif. Les personnages en sont des acteurs, des vedettes : Bergner; Porten, Emil Jannings, Heinrich George, von Stroheim, et les soeurs Kessler.


« Dans notre société », commente Handke, « les manières humaines telles quelles, devraient être montrées tout d’abord par une observation minutieuse des fonctions quotidiennes et apparemment libres de l’amour, du travail, du commerce. Ensuite, il faudrait observer minutieusement les formes traditionnelles du théâtre qui se posent en tant que critiques de ces fonctions quotidiennes, libres et dénuées d’artifice, soidisant, et les prétendent fausses, prétentieuses et abusives, etc. Car le théâtre lui-même, suivant les mêmes règles, est un abus et une exploitation, dépendant de la loi de l’offre et de la demande, comme l’image qui nous est montrée dans la pièce (La Chevauchée sur le Lac de Constance). »


Le titre de la pièce, La Chevauchée sur le Lac de Constance, fait allusion à une ballade allemande dans laquelle, à son insu, un homme à cheval traverse le Lac de Constance gelé, à la recherche d’un village. Arrivé au village, il demande où est le lac. On lui apprend alors qu’il vient de le traverser et que la couche de glace était extrêmement mince. Découvrant soudainement le danger dans lequel il se trouvait, l’homme tombe mort. Dans la pièce de Handke, c’est à la surface qu’est le danger. La conscience de la réalité devient une étreinte de mort pour les personnages à travers les ruses et les entraves de langage. Avec la connaissance de la hiérarchie et des ordres de grandeur du langage, la communication devient impossible entre les personnages. À la fin de la pièce, tous les personnages sont assis, en scène, silencieux et serrés les uns contre les autres, craignant que le moindre appel à l’aide puisse conduire à un malentendu. La distance de l’un à l’autre, la distance de communication, est La Chevauchée sur le Lac de Constance.


La mise en scène de Handke a été pour moi une exploration extraordinaire des profondeurs de la psychologie et de la schizophrénie. En dépit du fait qu’elles sont ésotériques, les observations de Handke, qui comprennent une certaine part de naïveté et d’évidence théâtrale, agissent par leur très grande subjectivité. Mais c’est précisément de cette manière que Handke a surpassé le théoricien, de la manière dont l’acteur comique dépasse toujours l’acteur problématique.


Pour moi, l’importance de Handke réside dans le fait qu’il a fait l’expérience d’une pratique esthétique directe dans le théâtre, et dans le fait qu’il a régénéré l’instrument théâtral. Dans une certaine mesure, les pièces de Handke revivent et remettent en question l’histoire entière du théâtre. Dans sa recherche, la prochaine étape peut consister à laisser derrière soi l’histoire du théâtre occidental, pour créer un nouveau théâtre utopique.


Claus Peymann


Traduction de Claude Clergé.
Ce texte est paru dans The Drama Review n° 54, juin 1972 (New York).

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