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Des voix sourdes

mise en scène Fábio Godinho

: La Pièce

La pièce commence par Nicolas, ce personnage à qui on demande beaucoup, mais surtout sa fortune. De l’autre côté on peut observer le deuxième personnage masculin, Stevan, qui lui est en demande perpétuelle et donne l’impression de tout posséder, de tout savoir, en regardant les gens comme un vainqueur, un assassin. Stevan est ce personnage isolé qu’on retrouve dans toutes les pièces de Koltès : un jeune homme errant caractérisé par la difficulté de rester en un même lieu.
Il est le personnage que personne ne connaît et dont tout le monde veut faire la connaissance. Le désir qu’il éprouve pour les deux femmes de la pièce, Anna et Hélène, le plonge dans un tourment intérieur. Il ne s’agit pas ici d’une conquête amoureuse, mais du désir pour l’Autre à travers l’effondrement de son propre désir. Tous les personnages de la pièce vivent un manque et essayent de donner quelque chose qu’ils n’ont pas à quelqu’un qui n’en veut pas.
Anna se laisse séduire par cet étranger au point de s’oublier et de toujours revenir vers lui, même lorsque Stevan n’est plus qu’un corps éteint abandonné au feu et à la nature. Néanmoins Stevan promettra lors de sa première rencontre avec Anna, suite à la demande de celle ci : « Je volerai, je détruirai, je tuerai. » Il volera la femme de Nicolas, Hélène, qu’il entrainera dans un jeu de va et vient en passant par la possession de l’argent de Nicolas jusqu’à la mort d’Hélène. Nicolas ne comprendra jamais comment elle a pu s’enfuir avec « cet étranger dont, quand il vous rencontrait, tout disait qu’il voulait tout vous prendre. »


Koltès instaure ici une temporalité forte, incorporée dans la structure de la pièce. L’action est donnée au lecteur/spectateur allant du début de soirée jusqu’à la nuit profonde, d’une arrivée à un départ. Ce mouvement de passage est intensifié par l’orage qui s’installe doucement. L’orage s’étend jusqu’à devenir violant et se retire revenant à son état de départ, laissant une trace incontournable derrière lui. Comme dans une tragédie classique le début n’est pas vide de passé mais au contraire il est chargé d’actions antérieures, qui ici sont assez étrangères. La première scène n’est donc pas le début et pourrait aussi bien être la fin.
La pièce trouve son point culminant lorsque l’orage est incontrôlable et que le vent emporte tout sur son chemin. Cet événement naturel est associé à la dernière rencontre entre Hélène et Stevan qui se rejoignent au pied d’un arbre, planté à la croisée d’un fleuve. Un étrange chaos se mêle à une entente singulière de ces deux êtres. Hélène qui a ramené l’argent de Nicolas, voit son but atteint et demande à Stevan de la tuer. Stevan exécute cette demande et, entre l’argent qui traîne dans la boue et la pluie qui tombe, il se laisse entrainer par le courant du fleuve mélangeant le sang et l’eau, la vie et la mort.
Nicolas détruit par Stevan, dans un calme étonnant, se laisse disparaître dans la fumée de sa propriété emmenant sa fortune avec lui. La pluie accompagne jusqu’à la fin le dernier personnage de cette tragédie, Anna, qui s’en va plus riche d’une expérience, plus solide, et prête à la conquête. Après avoir longuement essayé de sauver Stevan, courant d’une maison à l’autre pour demander de l’aide, elle se repose enfin. À l’intérieur, au chaud, au sec, elle berce les habitants. Demande le silence et chantonne.


ANNA. – Chut ! Fermez les yeux. Chut ! Dormez, dormez. Elle chantonne.

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