Dans l’adaptation du texte de Titus Andronicus, Heiner Müller combine l’histoire contemporaine et l’histoire antique et crée dès lors un nouveau type de récit, beaucoup plus vaste. Esclavages,   révolutions, clans mafieux, tortionnaires nazis, guerre en Afghanistan, déclin de l’union soviétique, guerre en Yougoslavie... Müller dénonce inlassablement le processus d’évolution de la logique capitaliste prospérant sur les bûchers, famines, révolutions et camps de concentration de ses opposants.

Un procédé dramaturgique remarquable  chez Müller  : le commentaire. Des zooms inattendus qui guident le lecteur/spectateur dans la logique du drame et du personnage. Le commentaire déplace les accents, fait exploser au ralenti la forme shakespearienne.

Nous allons utiliser ce procédé pour mettre en dialogue, en confrontation deux niveaux dramaturgiques  : l’action scénique et la rhétorique. Les commentaires seront traités comme des partitions chorales. Ils serviront à faire avancer l’action. Ils vont livrer le cheminement de l’auteur en donnant son point de vue sur certains faits du récit, leurs conférant ainsi une réalité subjective, indépendante. À la fin de la pièce, Müller précise que son « commentaire  » n’est pas l’apanage d’un narrateur. Il peut s’inscrire dans le drame, par la bouche même des protagonistes qui le vivent et/ou ne le vivent pas. Pour nous le commentaire va transformer, par moments, les acteurs en  « témoins-parlants  » de l’histoire humaine en marche.
Nous avons choisi la musique pour traiter ces commentaires. La musique comme « commentaire sur les commentaires  ». Il est important que la musique s’écarte de la logique narrative pour provoquer des ouvertures, des zooms sonores inattendus. Spatialement d’abord et en rapport avec l’histoire ensuite.