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Le Théâtre de Max Frisch

Le Théâtre de Max Frisch

de Isabelle Barbéris

Présentation

Le théâtre de celui que les médias avaient appelé le « Sartre suisse » est, comme celui de l’auteur des Mouches, épris de liberté et insurgé contre toute bien-pensance ; mais il s’en distingue par un scepticisme radical : chez Frisch, c’est l’apparence qui précède l’essence. Jouant habilement avec la posture du moraliste, Frisch nous livre un théâtre à mi-chemin entre réalisme et onirisme – avec des accents chabroliens, certes plus présents dans ses récits que dans ses pièces - dont la jouissance coupable, le narcissisme, l’égotisme, la fatalité des stéréotypes sont les principaux ressorts. La dimension fallacieuse du rapport à l’autre doit engager, chez Frisch, une responsabilité et un questionnement à la fois éthique et esthétique : « nous sommes les auteurs des autres », donc « nous sommes responsables du visage qu’ils nous présentent. » Ses pièces en formes de rondes tragicomiques mettent en mouvement des personnages prisonniers les uns des autres « parce que nous sommes la source, alors que nous nous prenons pour le miroir... » De cette condition angoissante de l’imagination, il ressort que les pouvoirs libérateurs de la littérature ne sauraient être qu’iconoclastes et négatifs : le langage est « un ciseau qui retranche tout ce qui n’est pas mystère », écrivait-il. Démystificateur de tous les songe-creux identitaires, Max Frisch fut entre autres l’inventeur du personnage subversif du « faux juif », là où William Faulkner, Boris Vian puis Philip Roth imaginèrent celle du « faux blanc. » Son théâtre du doute absolu et de la dérision, théâtre de la conscience politique plus que théâtre politique, constitue un solide remède pour notre époque éprise de certitudes.

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