theatre-contemporain.net artcena.fr

Moi Jacob, l'esclave d'Agbodrafo Wood Home

+ d'infos sur le texte de Jacques Bruyas
mise en scène Fernand Prince

: Note d'intention de mise en scène

Lors d'un séjour dans mon pays natal, au Togo, en avril dernier, j'ai fait la connaissance d'un jeune comédien togolais qui allait jouer le rôle de Jacob dans une création du texte à Lomé. J'ai souhaité découvrir ce texte. Il m'a mis en relation avec son auteur qui eut la gentillesse de m'en envoyer une copie. Le titre m'a interpellé et le sujet loin de me laisser indifférent. Ma famille, du côté paternel, est originaire de la ville évoquée dans le titre.


Le texte présente le témoignage de Jacob, jeune homme d'un village d'Agbodrafo, dont l'insouciance a conduit le village à se faire repérer par un clan rival. Ce qui leur a valu ensuite d'être dénoncé auprès d'un esclavagiste anglais récemment établi pour le commerce d'esclaves. Le village est alors décimé par ce dernier et ses hommes. Les prisonniers enchaînés furent, pour certains (les faibles, les blessés et les handicapés), jetés dans un puits servant alors de mouroir et les autres embarqués pour nourrir le commerce triangulaire de la traite... à l'exception de Jacob. Celui-­ci fut épargné et maintenu auprès de l'esclavagiste pour servir de comptable du nombre de " prisonniers " éliminés dans le puits.


Après maintes lectures, la voix de cet esclave qui évoque ses semblables (dont il est responsable de la perte ou de la séparation), témoignant des affres de l'esclavage et du malheur de l'homme (" prédateur d'entre les prédateurs "), n'a cessé de résonner en moi. J'ai donc décidé de créer sur scène Moi Jacob, l'esclave d'Agbodrafo Wood Home pour rendre compte, auprès de la jeune génération en particulier, de l'horreur de l'esclavage et d'évoquer avec empathie l'état de souffrance et de négation de leur humanité dans lequel se trouvent ceux qui aujourd'hui encore s'en trouvent être victime. La conséquence majeure d'une méconnaissance de l'esclavage est de fait le racisme flagrant ou pernicieux qui perdure de nos jours à travers le monde. Le texte évoque clairement cela et rappeler ce sujet de l'esclavage concourt autrement à une forme d'éducation permettant de combattre le racisme.


La représentation démarre avec la diffusion d'une ambiance sonore de ville et l'apparition d'un vieux comédien Noir, en tenue de balayeur de grande ville, balayant la scène puis s'y asseyant, prenant en main un livre dissimulé sur lui, l'ouvre en première page et lève le regard sur le public. Le balayeur endosse son rôle premier de celui-­ci qui nettoie, cherche, enlève, débarrasse tout ce qui est voué à remplir la " déchèterie " et devenu " le moins que rien " avant de finir par être éventuellement " recyclé ". C'est là le sens métaphorique qui m'intéresse avant tout : la liberté d'information et d'expression qui donne lieu au questionnement donne aussi parfois lieu -­ malheureusement -­ au révisionnisme et au négationnisme.


Sur un autre plan, en référence au proverbe " l'habit ne fait pas le moine ", le balayeur se pose aussi en conteur quand il s'assoit et se munit d'un livre, fonction intéressante dans la mesure où il apparaît métaphoriquement comme la source de cette histoire qui va être narrée par et au travers de Jacob, l'esclave. Il y a une tradition du conte en Afrique allant de pair avec celle des conteurs ou des griots.


L'obscurité plonge ensuite sur la scène après que le contact visuel est établi entre le balayeur-­conteur et le public. Ce dernier regagne les coulisses, laissant le public observant le puits qui trône sur la scène. De l'intérieur, sortira le comédien Noir interprétant Jacob... à l'inverse de ses semblables qui ont, eux, été jetés dedans pour y mourir. Jacob nous fait ensuite le récit de son témoignage. A intervalles, le comédien interprétant le balayeur jouera différents rôles (évoqués par Jacob) : un sorcier, un villageois, un berger...


Dans un coin de la scène et dans une semi obscurité se tiendra un joueur de Djembé qui ponctuera la représentation de sa musique. Celle-­ci trouve ici sa place en tant que moyen de communication lié à la vie sociale et à la culture africaine. Elle s'entendra au cours de la pièce, aidant à mieux se plonger dans les évocations de Jacob et à conjurer surtout Dieu et Esprits auxquels il s'adresse parfois. Il fait le récit de son témoignage auquel se mêlent chant, prière et conte.


À la fin des représentations et dans le cadre de rencontre-­débats, pourront être vidéo-­projetées des photos prises sur les lieux historiques d'Agbodrafo : le puits, la stèle du puits, "le casernement", l'entrée du village de Gatovoudo... Une exposition de photos prises par Jean Marie Gerard apportant un éclairage sur la culture togolaise et promouvant le développement touristique et culturel du village d'Agbodrafo pourra aussi être envisagée selon les lieux de représentations.

Fernand Prince

imprimer en PDF - Télécharger en PDF

Ces fonctionnalités sont réservées aux abonnés
Déjà abonné, Je me connecte Voir un exemple Je m'abonne

Ces documents sont à votre disposition pour un usage privé.
Si vous souhaitez utiliser des contenus, vous devez prendre contact avec la structure ou l'auteur qui a mis à disposition le document pour en vérifier les conditions d'utilisation.