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Les Mots sont des fleurs de néant. Je t'aime.

mise en scène Luc-Antoine Diquéro

: Le projet

Je me suis arrêté sur le dernier « écrit » de Richard Brautigan (il appelait ainsi toute sa prose : poèmes, nouvelles, romans) : Cahier d'un retour de Troie journal tenu entre janvier 1982 et juillet 1982 et qui « consiste à essayer de faire constamment fonctionner passé et présent de façon simultanée. »
Brautigan ne parle d'ailleurs pas de journal, mais de « carte-calendrier », et l'intitulé de s'imposer. J'y vois le possible d'un spectacle à inventer : La carte, celle qu'on écrit, celle qu'on dessine et de ce fait celle qu'on peut lire pour soi et faire entendre à d'autres, celle que l'on regarde et que l'on décrit pour d'autres : l'acte agissant du comédien.
Le calendrier que l'on consulte, parcourt : saute dans le temps, égrenage des jours, repérage de bouts de vie « déjà » au passé, projection dans un avenir plus ou moins incertain.
« Etre ce livre dans son devenir ne fait qu'accentuer mon désarroi au jour le jour. Peut-être la tâche que je me suis assignée avec ce livre était-elle depuis le début condamnée à échouer. J'aurais dû commencer par le mot illusion. »
Rendre compte de cette « illusion » à être ce livre, à faire se télescoper passé et présent, de cet essoufflement à se raconter en urgence, avec ce désespoir de l'inabouti, de l'inachèvement.
« Il reste dix lignes d'écriture sur cette page et j'ai décidé de ne pas me servir de la dernière. Je vais la laisser pour la vie de quelqu'un d'autre. J'espère qu'ils en feront meilleur usage que je ne l'aurais fait. J'ai tout de même essayé. »
Car c'est de cela dont parle ce « cahier », ces « cartes–calendriers » : de la mort qui rôde et taraude, celle des autres, mais aussi de la sienne à venir, et puis de la nécessité et de la difficulté à continuer d'écrire, de témoigner du ténu des choses, des êtres, des paysages, des amours fantasmés ou impossibles, des moments de paix arrachés à la grande plaie de l'angoisse… Tout cela mis à grande distance du pathos, par un humour, une lucidité, une ironie, un désabusé de styliste tout à fait singulier car : « La phrase de Brautigan hoquette et se rebelle, refuse soit d'avancer plus avant, soit de se clore, s'enfonce dans les méandres dont elle peine à sortir, refuse de trier le temps, accomplit son oeuvre parenthétique joue les refuges, les vernis, la peinture qui, dit-on, parvient seule à maintenir certains murs lézardés. » (Brautigan sauvé du vent, Marc Chénetier).

Luc-Antoine Diquéro

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