« Comme dans tous les grands classiques, on peut trouver des correspondances avec notre époque. La plus forte pour moi reste la cruauté des personnages.

Cette farce fait écho à notre temps, à sa cruauté, aux petits arrangements de chacun pour s’en sortir, à notre rapport au désir, au « Tout, tout de suite », à la manipulation, aux inégalités sociales.

Personne n’est innocent. Compte tenu de leurs situations, Hyacinte, l’orpheline désargentée, et Zerbinette, l’égyptienne marginale, voient sans doute leurs mariages avec deux bons fils de famille comme une porte de sortie, une ascension sociale bienvenue.

Les fils, bafouant leurs pères et leur milieu, réclament lâchement à leurs valets une solution miracle et immédiate. Il revient à ceux-ci, dernier rang de l’échelle sociale, de payer les pots cassés.

De leur côté, les pères s’arrangent entre eux, au détriment du sort de leurs fils. Géronte a une fille cachée, d’un second mariage douteux ; Argante a une fille – soi-disant – enlevée par des égyptiens.

Scapin, valet et repris de justice, soi-disant détaché des affaires du monde, met son talent au service des fils capricieux, égratignant au passage l’autorité des pères tout puissants. Maître des astuces, de l’improvisation et du tempo, tous les moyens sont bons dans la ronde infernale qu’il se propose de jouer.

Pour appuyer le rythme effréné de la pièce, quatre acteurs feront force de virtuosité pour interpréter les dix personnages de la pièce, tour à tour masqués ou non.

Les personnages évolueront dans un décor brut – un tréteau, une porte, des caisses en bois – entre dock et ring de boxe, lieu sombre où se joue le dessous des affaires. Ce décor mettra en valeur les lieux de représentation, laissant apparaître leurs reliefs en toile de fond.

Le masque permettra de grossir le trait de la farce et de représenter la truculence des personnages. Les masques, costumes et maquillages joueront sur l’intemporalité du propos, au service des caractères des personnages et de leurs situations.

L’adresse directe au public inclura les spectateurs dans l’histoire pour mieux goûter la farce et ses rebondissements. »

Pierre Yvon

octobre 2014