C’est en visitant, il y a deux ans, la bibliothèque Humaniste de Sélestat que j'ai découvert que ce personnage un peu scolaire d'Erasme, un peu empoussiéré, regorgeait de vitalité, que sa pensée était impertinente et ce qui m’a, je crois, le plus fasciné, c’est la place qu’il accorde à la « mesure », aux « vertus de juste milieu » comme il dit.

Nous vivons une époque extrême. Surabondance, excès, hypertrophie du monde, des égos … L’emballement de notre société nous affole. Erasme parle de mesure, de retrait, de distance, de silence.

Opposé à tout fanatisme, il n’a cessé de dénoncer en tant qu’homme, intellectuel et chrétien la monstrueuse stupidité des guerres, défendant par dessus tout la paix et le dialogue.

Enfin, bien qu’il n’ait pas particulièrement aimé le métier de professeur, sa réflexion sur la pédagogie en fait un des pionniers de l’éducation moderne. Fervent défenseur des humaniores litterae, c’est à dire  « des belles lettres qui vous rendent plus humain ».

Il ne s’agit pas pour moi, dans ce spectacle, d’assener la pensée d’Erasme comme une leçon, nos sociétés ne sont pas comparables, mais plutôt d’essayer de prendre la mesure un instant, du voyage que notre monde a fait depuis cette époque, et peut-être, au cours d’une courte halte, éclairés par l’ouverture et l’exigence de cet homme d’autrefois, engranger quelques forces pour continuer notre chemin solitaire.