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Lampedusa Beach

+ d'infos sur le texte de Lina Prosa traduit par Jean-Paul Manganaro
mise en scène Irina Brook

: Entretien avec Irina Brook

Propos recueillis par Caroline Audibert

Pourquoi avoir choisi ce texte précisément de Lina Prosa ?


C’est un texte que j’ai gardé dans mon coeur depuis que je l’ai vu à Paris. Ce monologue a été un énorme choc, autant par sa puissance que par sa poésie. Ce qui est vraiment intéressant dans cette écriture, c’est qu’elle traite un sujet très actuel avec une poésie à la fois contemporaine et épique. Car Lina Prosa s’appuie beaucoup sur les mythes de la tragédie grecque et les ancre avec force dans la Méditerranée d’aujourd’hui. Depuis longtemps, je pense à ce texte. Il y a quelques mois, j’ai trouvé sur mon bureau une collection des pièces de Lina Prosa envoyée par l’auteure, avec un petit mot. Ça a été le déclic.


L’importance de la tragédie grecque dans ce texte, est-ce aussi pour vous une manière de revenir aux sources du théâtre ?


Ce texte d’une actualité insupportable prend une dimension universelle grâce à sa transposition poétique. Par ce biais théâtral, nous pouvons sensibiliser le public d’une manière nouvelle. Nous devenons tous Shauba, l’héroïne de ce drame. Elle nous sort de notre individualisme pour nous toucher dans notre humanité la plus profonde, bien plus que le flux d’informations que nous recevons du matin au soir et auquel nous devenons insensibles. On va droit au coeur et à l’essentiel.


Romane Bohringer s’est-elle immédiatement imposée pour interpréter ce monologue ?


Romane est une magnifique actrice avec laquelle j’ai vécu deux grandes aventures théâtrales : La Bonne Âme du Se-Tchouan et La Ménagerie de verre. Cela faisait très longtemps que nous rêvions de nous retrouver. Nous avons profité de son passage au Théâtre National de Nice [J’avais un beau ballon rouge], pour faire un premier travail sur Lampedusa Beach.
Sur le plateau, nous avons immédiatement retrouvé un langage théâtral et humain que nous partageons. À travers une première lecture, j’ai vu à quel point le texte pouvait réunir et toucher un public. Par son contenu et son intensité émotionnelle, la pièce a ce pouvoir de rassembler les gens dans une profonde empathie qu’ils n’auraient peut-être pas à la lecture d’un article de presse. Pour moi, c’est une évidence, aujourd’hui, il faut jouer ce texte.


Cette évidence tient à la thématique de l’émigration ?


Les histoires de passeurs et de clandestins m’ont toujours bouleversée. Je n’ai jamais compris que des priorités économiques prennent le dessus sur l’hospitalité humaine. Comment pouvons-nous refuser de tendre la main à ceux qui risquent tout pour venir dans nos pays ? Comment l’homme réussit-il à ne pas se reconnaître dans l’autre ?
J’ai été marquée par l’histoire extraordinaire de ce village déserté du Sud de l’Italie qui a repris vie en ouvrant ses portes aux migrants. En 1998, le maire de Riace a commencé à accueillir les réfugiés sans papier et réinventer l’avenir de son village qui ne comptait plus qu’une centaine d’habitants. Tout a repris vie petit à petit. En redémarrant l’artisanat local et en l’enrichissant par leurs propres traditions, les étrangers sont devenus les acteurs de cette utopie contemporaine.
Aujourd’hui, l’émigration est un sujet brûlant. On ne peut plus se taire. Tant qu’on juge qu’une vie a plus de valeur qu’une autre, on est loin d’une solution. Comme le dit si justement l’auteure sénégalaise Fatou Diome : “On sera riche ensemble ou on se noiera tous ensemble”...

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