À partir de ces idées directrices, il s'agit de commencer à esquisser les premières images d’un espace en lien avec cette Situation. Et encore une fois pour l’espace, le problème est relativement similaire : comment rendre compte du principe qui permet une infinité de situations plutôt que les accessoires de ces situations ? Autrement dit, comment éviter d’accumuler les trônes en faïence et les fauteuils roulants ? Plusieurs éléments viendront dès lors dessiner cet espace que l’on veut tendu entre ouverture et clôture, à l’image de la Situation elle-même.

Dans la mesure du possible, l’espace sera presque totalement clos en ses côtés grâce à des pendrillons chargés à l’allemande, à l’exception d’un couloir central s’ouvrant vers les coulisses latérales. Tout au long de ce couloir sera répété cinq fois un motif de deux chaises placées de trois-quart face public et en miroir l’une de l’autre. Les couples de chaises situés aux extrémités du plateau pourront déborder vers les coulisses latérales afin d’accentuer l’impression d’ouverture vers un hors-scène - en l’occurence un espace-temps s’étendant vers l’infini en ses deux extremum.

Cet espace central est envisagé comme un temps spatialisé, à la manière de ces frises chronologiques qui appliquent au déroulement du temps le sens de la lecture. Au centre le présent de l’action - avec la chaise où Lui sera assis -, au Jardin le passé - c’est-àdire les cycles déjà écoulés - et à la Cour le futur - les cycles à venir. Ce rapport entre espace et temporalité sera rendu par un travail sur la matière même des chaises.

Chaque couple de chaises représente un cycle, et sera ainsi traité en fonction de son éloignement temporel : les cycles passés feront l’objet d’un traitement en patine de plus en plus appuyé tandis que les cycles futurs pourront arborer des éléments d’emballage par exemple. Le jeu des acteurs prendra ainsi constamment appui sur cette temporalité spatiale, passant de « l’homme qui vous ressemblait » à « l’homme qui ressemblait à l’homme qui vous ressemblait » avant de se diriger lentement et inlassablement vers une énième répétition future.