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En remontant le Niger

+ d'infos sur le texte de Arezki Mellal
mise en scène Maria Zachenska

: Genèse du projet

J’ai entendu pour la première fois la pièce d’Arezki Mellal « En remontant le Niger » en 2005 à Limoges en lecture publique. Des années auparavant, son roman « Maintenant ils peuvent venir » m’avait littéralement bouleversée. Je découvrais alors, en plus d’un indéniable talent de narrateur, l’humour chez cet auteur et le trait grinçant de son regard acéré sur le rapport noir/blanc.


Arezki Mellal est algérien, donc africain pour les européens et blanc pour les africains. Au-delà de l’infranchissable Sahara, frontière plus efficace que bien des mers, plus proche des occidentaux par la couleur de la peau et un passé commun d’esclavagistes, il génère chez les uns, méfiance et circonspection. Pour les autres, qui oscillent entre culpabilité et nostalgie, il n’est qu’un ex-colonisé, barbare d’un sud au passé non soldé, aux multiples mystères et aux dangers innombrables.


Lors d’un séjour au Mali en résidence d’écriture, Arezki observe cette étrange relation qui s’instaure entre noirs et blancs, mélange d’attraction, de fascination mais aussi parfois de rejet et d’aversion. Il décrypte et analyse cette curieuse mécanique avec peine et amusement à la fois. Tiraillé, coincé entre deux océans, l’un de sable, l’autre d’eau, riverain de deux mondes, étranger à l’un et à l’autre tout en appartenant à chacun d’eux, il est dans la situation idoine pour en appréhender les enjeux. Il y adjoint sa fine connaissance politique de la relation France-Afrique et poursuit son examen de l’âme humaine dans ses travers les plus sombres, ses appétits les plus bas.


« En remontant le Niger », substrat de cette étude scrupuleuse et caustique est non seulement une pièce savoureuse et drôle, mais c’est aussi une parole nécessaire à l’appréhension de notre monde, où l’autre semble encore et toujours réduit à la seule projection que l’on a de lui, objet de toutes les convoitises tout autant que prétendu auteur de tous nos malheurs.


Maria Zachenska naît et grandit en Slovaquie, un pays régit par le dogme marxiste, où les hommes, tous les hommes, sans distinction de race, d’origine ou de sexe sont décrétés égaux par nature. Lorsque jeune femme déjà, elle aborde la France et Paris, elle découvre, stupéfaite, les innombrables préjugés et légendes qui continuent d’habiter les esprits. Passé le stade de l’incompréhension, elle s’indigne, s’insurge. Comment au pays des droits de l’homme, dans cette terre d’asile à la réputation non usurpée à l’époque, peut-on faire circuler de telles idées nauséabondes ?


Mais Maria a décidé depuis longtemps d’aborder le monde à travers le prisme de l’humour, salvateur dans un pays rongé par l’absurdité politique. Par la bouffonnerie, la farce, la comédie, la métaphore, avec une exquise sensibilité et une rage inventive, elle s’arme en pensée, persifle, ridiculise et à la fin porte ses coups. Ses traits d’esprit acérés dénoncent la bêtise, ses satires accusent l’insanité. Formée à l’école slave, elle exige de ses acteurs virtuosité et engagement total, impose un jeu extrêmement physique, allie une grande théâtralité à la simplicité d’une scénographie fonctionnelle.


C’est pourquoi j’ai offert à Maria aujourd’hui de mettre en scène « En remontant le Niger », d’allier son talent à celui d’Arezki et d’attester du grotesque de ces affabulations.

Valérie Baran, directrice du TARMAC de la Villette

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