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Derniers remords (.)

mise en scène Cédric Veschambre

: Regard sur la mise en scène

Doit-on prolonger un héritage (quel qu ‘il soit), ou rompre avec lui ? Peut-on rêver d’un avenir que l’on ne connaît pas, qui n’est pas définit ?


Au commencement, Derniers remords, c'est donc le verbe : l'objectif c’est d'être honnête, avec soi-même, les autres, le monde. Les personnages commettent des gaffes, s'obstinent à chercher le mot juste, le ratent, et chaque ratage nécessite une correction (les mots sonnent toujours un peu faux). Il y a ce qu'on cherche à dire, ce qu'on n'arrive pas à dire, ce qu'on doit pourtant bien dire, tout en ne disant rien. Mais pour vivre ensemble, il faut bien parler et c'est là que les remords arrivent. Il faut parler. Parler d'argent pour faire croire qu’on ne veut pas parler d’amour. Alors on fait tout pour en parler tout en n’en parlant pas.


« Dire à la place d'aimer, en guise d'aimer. S'en moquer aussi.
Les choses essentielles sont sans importance, et réciprocité. »
Jean-luc Lagarce


J’ai voulu observer de près ces petits remords, corrections, maniaqueries ; Considérer ce langage comme un outil pas plus important que ça. Se jeter dans les mots, foncer et réfléchir ensuite à ce qu'on a dit. Rester à la surface. Traverser des blessures. Traverser et puis c'est guéri et on passe à autre chose.
Vingt sept scènes. Vingt sept rendez-vous manqués, les ratages de paumés (adultes et actifs) vus de façon impitoyable et tendre (pas si facile que ça d'être malhonnête). C’est par ratages qu’on avance. Il y a d’abord désespérément le quotidien du texte ; puis, l’humour surgit, incontestable, chargé de cruautés. Comédie sarcastique. Drame de l'incommunicabilité. Il y a tout le temps un aller-retour, une danse (la chose à trouver). Sans tristesse ni nostalgie, entre comédie et tragédie, on avance à reculons par accidents et vers l’oubli. J’ai cherché à faire cohabiter l’acteur, l’auteur, la figure, l’histoire ou l’absence d’action de façon joyeuse ou au moins non tragique. Au-delà des omissions, des postures de tricherie, se sont les corps qui disent malgré les mots les pulsions, les répulsions, les désirs (d’hier et d’aujourd’hui). Ils disent aussi les rapports au lieu, aux choses, leurs précautions, leur insolence ou leur désinvolture.
Cette rythmique des corps et des rencontres successives m’a amené à me détacher de l’écriture papier du texte et à essayer de mêler les scènes. Qu’elles se percutent les unes les autres, et bousculent les bienséances de ces trois post-soixante-huitards accompagnés de leurs pièces rapportées. Redoublant la cadence, gardant le silence pour le début et la fin, j’ai souhaité que les répliques se croisent et fassent écho au jeu sur le langage de Jean-Luc Lagarce. Un jeu rapide, délicat et dangereux, choral, empli d’humour et de référents contradictoires, se riant les uns les autres. Chaque personnage reste présent, écoute, entre dans le jeu, choisit de se tenir à distance, de se rapprocher des uns ou des autres. Le parcours intérieur de chacun se dessine alors : des chants viennent les appuyer. Réorchestrés et rechantés en direct, ils font écho soit à l’œuvre de Lagarce, soit au temps du texte, ou deviennent des projections d’ouvertures possibles. J’ai utilisé l’imagerie et les symboles du mouvement de Mai 68 pour rendre concret ou rappeler le temps d’amour du trio Hélène/Pierre/Paul. Enfin une lecture biblique de la pièce m’est apparue : Les figures de Pierre, Paul et Hélène comme des résurgences des deux apôtres et de Sainte Hélène. Une façon d’utiliser les actes et traits de caractères des « Saints Hommes » pour solliciter l’imaginaire et le symbolique. De quoi s’amuser des références, comme Jean-Luc Lagarce s’en est joué en y mêlant (comme souvent) dans sa propre biographie…


Cédric Veschambre, août 2007

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