Une écriture issue du réel

Trois points tirés de la vie réelle des comédiens de La Bulle Bleue ont influencé cette création :

Marion Mateu, une des comédiennes qui joue dans le spectacle, utilise le dessin comme moyen mémo-technique pour mémoriser et fixer les choses. C’est en observant ses cahiers, sa façon d’écouter que j’ai inventé cette histoire, celle d’Alice qui finit par passer de l’autre côté. Celle d’une artiste qui fuit le réel pour se réfugier dans son monde imaginaire parce qu’elle ne le comprend pas. J’ai toujours été fasciné par l’art brut et la nécessité vitale de ces artistes de créer jusqu’à l’épuisement ou le recouvrement total du réel comme « pique assiette » qui avait fini par recouvrir toute sa maison, son mobilier jusqu’à sa chaise et son poêle qu’il ne pouvait plus utiliser.

Philippe Poli, un des comédiens vient de déménager, cet évènement déséquilibre et bouscule son quotidien.

La collaboration avec l’Ecole Plein Air à Nîmes (initiée avec le Théâtre de Nîmes). L’Ecole Plein Air est une école publique de la ville de Nîmes spécialisée dans l’accueil d’enfants malades ayant besoin d’un suivi infirmier très régulier (à partir de 5 ans jusqu’à leur 12ème année). Les comédiens de la Bulle Bleue ont travaillé en lien avec les enfants dans une relation d’aînés à cadets. Ils ont partagé des temps d’ateliers et le spectacle de fin d’année, afin de se familiariser à ce public pour lequel ils vont jouer : le jeune public et se sont nourris de ces échanges dans leur travail de création.
Ces élèves parcouraient énormément de kilomètres pour rejoindre cette école « adaptée » à leur soin. Alice déménage pour rejoindre une école « faite exprès pour elle ».

L’art Brut

Pour ce projet, nous allons travailler sur la notion d’Art brut, l’esthétique du spectacle y fera référence ainsi que la création musicale.

L'Art Brut regroupe des productions réalisées par des non-professionnels de l'art, indemnes de culture artistique, oeuvrant en dehors des normes esthétiques convenues (pensionnaires d'asiles psychiatriques, autodidactes isolés, médiums, etc.). Dubuffet entendait par là un art spontané, sans prétentions culturelles et sans démarche intellectuelle.

« Nous entendons par là des ouvrages exécutés par des personnes indemnes de culture artistique, dans lesquels donc le mimétisme, contrairement à ce qui se passe chez les intellectuels, ait peu ou pas de part, de sorte que leurs auteurs y tirent tout (sujets, choix des matériaux mis en oeuvre, moyens de transposition, rythmes, façons d’écriture, etc.) de leur propre fond et non pas des poncifs de l’art classique ou de l’art à la mode. Nous y assistons à l’opération artistique toute pure, brute, réinventée dans l’entier de toutes ses phases par son auteur, à partir seulement de ses propres impulsions. De l’art donc où se manifeste la seule fonction de l’invention, et non, celles, constantes dans l’art culturel, du caméléon et du singe. » — Jean Dubuffet, L’art brut préféré aux arts culturels, 1949 (Manifeste accompagnant la première exposition collective de l’Art brut à la Galerie Drouin, reproduit dans Prospectus et tous écrits suivants, Gallimard, 1967).

Les « artistes » d’art brut se réfugient dans l’irrationnel, le rêve ou le cauchemar. Contrairement aux artistes académiques, ils ignorent les contraintes et les règles des beaux-arts.
Ils inventent des univers déroutants à partir d’objets collectés, rangés, subtilisés parfois.

La marionnette

Dans ce spectacle, les personnages seront interprétés par des marionnettes.
L’outil marionnette permet à l’acteur de devenir manipulateur. De mettre en avant et en regard, un objet ou un personnage : de l’animer et lui donner vie. La marionnette est animée par le comédien, devant lui, mais comme un autre corps, un qui ne lui appartient pas. Une façon de se dédoubler, de mettre de la distance et du recul avec les situations explorées.
La marionnette sera également l’opportunité de découvrir le domaine des arts plastiques ; les comédiens ont fabriqué eux-mêmes leur personnage.

Christelle Mélen