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Ce que le djazz fait à ma djambe

Jacques Gamblin ( Conception ) , Laurent De Wilde ( Direction musicale )


: Entretien avec Jacques Gamblin

Propos recueillis par Pierre Notte

Mais enfin qu’est-ce qui vous prend ? Vous n’aimez pas le jazz…


Encore un défi ! Mais si j’aime le jazz, je ne suis pas un grand connaisseur ou collectionneur de jazz, mais j’aime cette musique, et puis ça ne veut absolument rien dire « j’aime ou j’aime pas le jazz », ce serait comme dire j’aime le sport ou j’aime pas le sport, j’aime les oeufs, oui mais je n’aime pas les omelettes. Alors est-ce que j’aime les oeufs ? C’est pas que blanc et noir comme les touches du piano. Il y a du jazz que j’adore et du jazz que j’aime moins. Une chose est sûre, c’est que le chabada me fait tricoter de la jambe. Et ça suffit amplement à me donner envie de la faire tricoter aux autres !


Le spectacle vous a-t-il réconcilié avec la musique, vous qui avez échoué au piano, à la guitare et à la batterie ?


Je n’ai jamais été fâché avec la musique, et ne le serai jamais. Il n’y a rien pour moi de plus enthousiasmant que la musique. Parce que la musique, quelle qu’elle soit, c’est le corps et la tête en même temps. Ce n’est que sensation et désir, désir de bouger ou simplement de s’étendre… Je suis frustré de ne pas la pratiquer c’est tout, le temps n’est pas élastique… Et c’est pourquoi je délègue, je mets mes rêves en face de moi en la personne de Laurent de Wilde et des cinq autres musiciens et je les admire à distance. De temps en temps je mets des mots sur mes rêves de musiques et réciproquement. En fait, ce spectacle me réconcilie avec tout ! C’est difficile de faire mieux. Avec la joie, les rapports humains, l’énergie, l’amitié, le plaisir, la danse… Que des choses avec lesquelles je n’ai jamais été fâché, mais il les soulève en scène.


« Lady Jazz », vous l’imaginez comment ? A-t-elle un corps ? Une voix ?


C’est le rêve dont je parlais précédemment. C’est la musique tout simplement. « Lady Jazz », c’est la musique en général. Tous les états amoureux sont traduisibles en musiques. C’est une rencontre avec la musique et l’état dans lequel ça me met, ça nous met. Peu de gens sont rétifs à la musique.


Le monde du jazz est essentiellement un monde d’hommes… La femme est-elle un fantôme ?


La femme est souvent une voix dans le jazz. Une voix tellement chaude, qui vous enveloppe, qui vous tient, c’est une voix avec des mains. Partout des mains. Qui caressent, qui vous serrent, qui vous prennent et qui vous lâchent sur la dernière note. Et vous tombez comme une merde et déjà elle vous manque !


Ce qui devait être une carte blanche d’un soir, est devenu un spectacle… Comment expliquez-vous ça ?
C’est l’invention d’un genre ?


Le point de départ est Jazz sous les pommiers , 30ème anniversaire de ce grand festival à Coutances dans la Manche. Carte blanche, envie de dire merci à la musique. Je collecte des textes et des textes et finalement je me mets à écrire moi-même une histoire… d’amour évidemment, bien sûr ! Qui traverse les saisons. Une histoire que je joue, que je narre, que je « sketche » ou que je parle-rythme, mais que je ne chante pas, une histoire accompagnée par la musique que Laurent de Wilde a composée, et qui est plus funk, plus « groove » que « tradition ». Et ce spectacle fait la même chose depuis trois ans, il traverse les saisons, il évolue sans cesse, et nous manque à tous dès qu’il est remisé. Je ne sais pas si c’est l’invention d’un genre, mais c’est mon genre. Je n’arrête pas d’associer des formes, ce sont des défis plutôt gonflés, mais au final très joyeux. Comme avec Tout est normal, mon coeur scintille où le public regardait la danse contemporaine d’un autre oeil, ici c’est le jazz. C’est un spectacle très ouvert, pas « méningique » du tout. C’est de la musique, des mots, une énorme complicité, des moments purement musicaux ou purement théâtraux… Chacun y va de son solo, et tout ça pour raconter une histoire de rencontre. C’est simple tout en étant atypique tout en étant simple. C’est ce dont le public témoigne depuis que ce spectacle se promène.


Vous parlez du « désir de jouir », savez-vous d’où provient le plaisir, sur scène ? Cette excitation, cette jouissance ou cette joie ?


Le « jouir » en scène est plutôt rare ! Non, je rigole, mais c’est vrai. Et quand ce plaisir-là arrive c’est comme une forme de grâce, on ne veut surtout pas le regarder en face de peur qu’il foute le camp ! On a l’impression d’être dedans et dehors à la fois, c’est extraordinaire mais si on court après ça, c’est foutu, c’est la meilleure façon de passer à côté. Il faut laisser venir, c’est mystérieux. C’est presque un sujet tabou ! Tu as peur de le nommer parce que tu te dis « si je le nomme il ne reviendra pas demain. » Ce spectacle est précisément celui dans lequel je prends plus de plaisir que je n’en ai jamais eu. Le fait de la musique sans doute, de l’admiration que j’ai pour Laurent de Wilde, de la complicité avec tous les musiciens, mais aussi le fait de danser avec les mots. Il y a tout ce que j’aime là-dedans finalement, les mots, la musique, le mouvement, l’humour et… la connivence pour ne pas dire l’amitié.

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