: Ombres, personnages, figures
Dans Avril 08, conte moderne, un « Amant » bascule dans la
violence par incapacité d’accomplir ses idéaux. De retour
du Nord Kivu où il travaillait au sein d’une ONG, en proie à
ses mauvais démons, il s’engage dans la Légion étrangère et
périt en Afghanistan.
« L’Amant » a un amour de jeunesse, inacessible, une
« Jeune Femme » dont le mutisme fascine : ses compagnons
trouvent auprès d’elle une attention rare, sensuelle. Mais ils
ne la comprennent pas. Ses journées sont mystérieuses et ses
désirs impénétrables : elle fuit ses visions hallucinées dans la
noirceur d’une cave, en bas, à lire, penser, apprivoiser des
mots... Enfin, au coeur de la nuit, lorsque les troubles s’apaisent,
elle reçoit la visite d’un « Homme aux loups »…
La « Jeune Femme » partage sa vie avec un « Homme »,
ivre de revanche sociale, qui brûle de réunir, grâce à ses manipulations
boursières, l’argent qui lui permettra de fonder sa
propre société d’investissement ; type de l’homme moderne
exilé de son intériorité, et produit d’un capitalisme égaré. Mais
« l’Homme » fait l’expérience de l’inanité de ses constructions
mentales.
Enfin, le « Frère » de la « Jeune Femme », un peu trop
« rimbaldien », était directeur de la communication dans le
groupe de son père avant de tout quitter. Tourmenté par de
perpétuels accrocs de langage, il doute de sa propre identité,
hanté par la gémellité qui l’unit à sa soeur.
Le récit avance par vagues successives ; les sauts narratifs
et temporels en révèlent peu à peu la cohérence interne.
« L’Homme aux loups », qui apparaît pour la première fois sous
les traits de « L’Homme sans abri », garde soigneusement entre
ses mains les clés de ce conte. Personnification de l’angoisse, il
ne manque pas de nous réjouir, tout en réveillant nos troubles
et nos peurs les plus archaïques.
Nous cherchons le moyen de donner à ces fulgurances
une légitimité esthétique qui rende au coeur sa légèreté.
Je ne conçois pas la mise en scène comme simple interprétation
de mon texte. L’écriture est une matière. Elle trouve son
accomplissement sur le plateau, dans les aspects spatiaux, visuels
et sonores. Je cherche le point de rencontre entre l’écriture et
l’acteur pour que tous deux se parlent… De même, j’établis
une relation de dialogue entre l’écriture et la scénographie, la
vidéo-projection, la lumière, le son et les costumes. C’est en
leur point de croisement que se situe l’expérience théâtrale, et
j’invite le spectateur à venir écouter, éprouver, expérimenter
ce que la vie a d’incertain, de sensible, de singulier… C’est à
cette condition seule que la grâce peut advenir.
Fabrice Dauby
Ces fonctionnalités sont réservées aux abonnés
Déjà abonné,
Je me connecte
–
Voir un exemple
–
Je m'abonne
Ces documents sont à votre disposition pour un usage privé.
Si vous souhaitez utiliser des contenus, vous devez prendre contact avec la structure ou l'auteur qui a mis à disposition le document pour en vérifier les conditions d'utilisation.