: Note d'intention
Pour adapter 2666 au théâtre, je vais conserver la structure de l’œuvre, les cinq parties. Bolaño essaye de cloisonner fortement les histoires, mais laisse aussi entrevoir au lecteur la possibilité de croisement à l’intérieur de celles-ci, possibilité qui se verra parfois confirmée, souvent désactivée. Le spectacle qui naîtra de cette adaptation durera entre huit et neuf heures. Je veux qu’il soit pour le spectateur ce qu’il est pour le lecteur, énorme, infini, jouissif, pénible parfois. Je veux le concevoir comme une expérience totale, une traversée commune entre les acteurs et le public, en en gardant sa force et sa complexité. Il y aura entre quinze et vingt acteurs au plateau qui seront, comme c’est toujours le cas dans notre travail, tour-à-tour musiciens, performers, narrateurs quand il le faudra, ou personnages. Je veux réunir tous les outils nécessaires à la tentative de somme théâtrale que nous faisons, dans la scénographie, dans la lumière, le son ou la vidéo.
Comme c’était le cas avec Les Particules élémentaires, je suis certain que ce roman, la langue de ce roman, peut résonner avec une puissance incroyable sur un plateau de théâtre. Je fais le pari que nous pourrons, dans cette traversée gigantesque, essayer de dire à notre tour ce que Bolaño écrit dans son livre Amuleto : « un cimetière de l’année 2666, un cimetière oublié sous une paupière morte ou inexistante, aux aquosités indifférentes d’un oeil qui en voulant oublier quelque chose a fini par tout oublier. »
Julien Gosselin
mars 2015
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