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C'est une affaire entre le ciel et moi

d'après Dom Juan de  Molière

: Une affaire entre Dom Juan et moi

Aller au bout des émotions, des sensations, des humeurs. Titiller la société, les convenances et les conventions. Provoquer les autres, le ciel, le destin… Que diable (si tant est qu’il existe) : il s’agit d’aller de l’avant.


La nouvelle création de L’agence Louis-François Pinagot (L’aLFP) interroge le donjuanisme dans une mise en perspective singulière et pointue. À l’instar des précédents spectacles Pour la libération des grands classiques ou Les artistes de la contrefaçon, C’est une affaire entre le Ciel et moi propose une approche inédite de canons de l’art dramatique.


Convoquant, dans un véritable chantier théâtral, tous les métiers de la profession, cette investigation de longue haleine entend reconnecter le spectateur avec des problématiques antédiluviennes à travers un spectacle limpide et organique, saturé d’émotions et de provocations à la morale.


La séduction et le désir sont depuis toujours un moteur d’inspiration dans les arts et la littérature. Don Juan en est une figure emblématique. Parmi les nombreuses incarnations de cet érotomane légendaire chez Tirso de la Molina, Mérimée ou Mozart, L’aLFP a choisi de fonder sa création scénique sur le Dom Juan de Molière. Dans cette version du mythe se mêlent comique de situation, pathos amoureux, philosophie de bas étages et réflexions sociétales avant-gardistes, superstitions et croyance, savamment alternés, dans un déferlement d’une virtuosité rare. Ici, ce texte jubilatoire devient un terreau à labourer pour laisser croître les perspectives inattendues d’une écriture de plateau et d’une recherche intenses qui définissent la méthode de la compagnie – historiens, philosophes et sociologues à l’appui.


Loin de prétendre à une soi-disant criante actualité du texte de Molière ou de se calfeutrer dans un confort intellectuel condescendant, cette mise en scène et en perspective prend le risque d’explorer les possibles de ce texte foisonnant et ivre de liberté, dans une lecture plurielle, qui rende à Dom Juan toute la verve de sa posture.


Il n’empêche : Pourquoi mettre en scène le Dom Juan de Molière aujourd’hui ?


Boris Vian prétendait : « Tout a été dit cent fois, et mille fois mieux que par moi. Aussi, si j’écris des vers, c’est que ça m’amuse. »


Cette formule provocatrice ne saurait résumer les enjeux du spectacle, mais c’est dans cet esprit que L’aLFP envisage les classiques. Bien plus que de proposer une lecture ou compréhension d’un texte, il s’agit d’offrir une vision jouissive des terriens (vus de la lune) à travers le prisme de grands interprètes de l’humain, comme le fut, par exemple, Molière.


Susan Sontag écrit « We don’t need an hermeneutic of arts, we need an erotic of arts », résumant – sur le mode du défi – l’enjeu du spectacle . L’herméneutique (en clair : l’interprétation) et l’érotisme peuvent faire corps.


Avec des acteurs, créateurs de leurs propres personnages, c’est le pari d’une adaptation incarnée et sensuelle du Dom Juan qui se joue de tout, et mise sur tout, que L’aLFP entend relever avec C’est une affaire entre le Ciel et moi.

Roswitha Kreil

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