Entre trois langues et deux continents, la metteur en scène Élisabeth Marie (Scarface Ensemble, Strasbourg), les comédiennes Rinio Kyriazi (Athènes) et Selin Altiparmak (Istanbul) et le musicien Cyril Alata explorent le passé mythique et historique de l’Europe à la recherche, faute d’une nouvelle utopie politique, de voies de coexistence, de dialogue et de dignité, de modalités à la faveur desquelles nous pourrions recommencer à imaginer l’avenir.
À un carrefour situé entre Nord et Sud, Est et Ouest, quelque part, à un poste frontière auquel aucune route ne mène et qui symbolise peut-être l’impasse de l’Europe d’aujourd’hui, l’équipe imagine la rencontre de trois femmes —Penthésilée, reine mythique des Amazones, Io, maîtresse de Zeus condamnée à l’errance, Margarita, médecin de l’ex-Union Soviétique évoquée dans l’œuvre de l’écrivain biélorusse Svetlana Alexievitch.
Figures mythiques et historiques, elles ont toutes trois subi la violence des hommes et de l’Histoire et ont toutes trois quelque chose à nous dire au sujet des mythes fondateurs, du passé et du présent du Vieux Continent. Piégées en ce lieu par l’Histoire elle-même, condamnées à coexister, elles recherchent ensemble des issues. Le parcours puise aux mythes grecs et à la tragédie antique, au romantisme allemand (Kleist) et au monumental recueil de témoignages recueilli par S. Alexievitch sur le thème de la fin du communisme (La Fin de l’homme rouge, Actes Sud 2013). À partir de ce matériau hétéroclite — qui, tout hétéroclite qu’il soit, n’en constitue pas moins notre héritage —, la recherche fait retour au point le moins visible et le plus violent de notre actualité: à l’exploitation des êtres humains et, au premier rang, à celle des femmes, aux frontières et au cœur de l’Europe actuelle.