Le rite et le spectacle

Le corps est là, s’offre à la vue du spectateur, sujet et objet à la fois. On pourrait imaginer que c’est une ballade dans et dehors du corps, où le corps est le vaisseau et l’espace à la fois. J’aime envisager la forme du spectacle comme un rite chorégraphique: dans cet espace vibratoire entre l’interprète et le spectateur on assiste à la naissance de l’Idée d’un Corps. Mais ce corps n'est pas celui de la danseuse, c'est un corps symbolique, archétype, social, un corps qui est le lieu de la communication.

La posture et l’imaginaire

Chaque forme peut être une posture, qui propose un rapport à soi et au monde, tel que l'on peut le ressentir dans l'art de la sculpture. Nos corps sont composés par un réservoir d’images de postures propre à notre expérience personnelle mais aussi en partie commun à tous par notre culture et ses représentations. Qu'est-ce qui nous oriente pour identifier un corps en bonne ou mauvaise posture, fort ou faible, paresseux ou efficace, ...? Que se passe -t-il dans les interstices entre ces postures extrêmes? Je collecte des postures sans noms, et tente de me réapproprier celles qui semblent connues, de les interroger. Pour cela je joue avec les paramètres qui composent la posture: l'intention (directionnelle, musculaire), le ton, la forme, la figure, le potentiel expressif, la sensation...j'envisage la posture comme un réservoir et l'altère par son propre contenu.

L'écriture chorégraphique est issue d'une exploration de la mise en mouvement du corps par chaque possible texture ou couche de la peau des os, des organes, un processus de dé-hiérarchisation des parties du corps. Le mouvement continue constamment qu'il soit visible ou non, même dans l'apparente immobilité. C'est ce qui permet de bouger "à l'intérieur" de la posture, d'en déplacer le point d'ancrage. Je cherche à faire vibrer la proximité entre être En-posture et en Im-posture, à exposer la négociation à l'oeuvre lorsque nous composons notre image et tous les ajustements que nous faisons pour y correspondre.

Le contenu "dramaturgie" se construit entre l'interprète et le spectateur

J'essaie de toujours garder quelque chose de la posture à l’oeuvre et d'en altérer qu'un aspect, qu'une partie, cela permet de placer l'attention sur ce qui se négocie dans le changement, la manière de s'approprier un nouveau contenu. Ce processus de composition produit un espace particulier pour le performer et pour le spectateur. Le performer doit être à la fois extrêmement engagé dans chaque instant de l écriture de son corps et de ses intentions mais il est en même temps dégagé de la responsabilité de maitriser le sens dramaturgie de ce qu'il produit, il est acteur et témoin. Ce processus permet aussi au spectateur d'identifier la proposition gestuelle auquel il assiste, d'en noter le contenu formel et d'y attribuer selon son ressentit un caractère affectif, dramaturgie. D'une certaine manière le spectateur compose son regard _ il a accès aux mots du langage et c'est lui qui les nomme ou choisit de ne pas les nommer.

L'enjeu, ou plutôt mon désir est de tenter de soutenir une posture non seulement chorégraphique mais aussi 'productive' ou je peux concilier un engagement intense et un abandon, une passivité, en tous cas une disponibilité.

Scénographie

Un espace monochrome, entre le fond de scène et le sol, constitué par des tapis de scène blanc suspendus en fond de scène.

Durée

Le spectacle dure 50 minutes.