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La Seule certitude que j’ai c’est d’être dans le doute

+ d'infos sur le texte de Pierre Desproges

: Lettre ouverte à Monsieur Pierre Desproges

écriveur de textes, emporté à son insu par un crabe affamé qui lui broutait le poumon

Cher Pierre (vous permettez que je vous appelle Pierre),
Je ne vous oublierai jamais. Aussi longtemps que Dieu me prêtera vie (merci mon Dieu de me laisser le cancer en sourdine), je rêverai à la possibilité d’être de vos amis.
Le théâtre est fait d’enfance, d’imaginaire et d’amitié.
On dirait que nous nous serions rencontrés à l’école sur le banc de touche de ceux qui ne jouent pas au football.
On dirait que toi (tu permets que je te tutoie maintenant qu’on est amis) tu serais « prem » en français et moi « prem » en récitation.
Adolescents, on aurait eu tous les deux des boutons plein la figure et pour séduire les filles, qui sortent toujours avec des « plus-grands-sans-boutons-qui-jouent-au-foot », on les aurait fait rigoler avec tes textes au verbe héroïque qui pourfendent les « plus-grands-sans-boutons-qui-jouent-au-foot ».
On dirait que nous aurions bu notre premier saint-émilion grand cru classé ensemble (même si moi j’ai un petit faible pour le saint-joseph que fait mon cousin en Ardèche à Mauves, c’est facile à trouver, il s’appelle Gonon comme moi).
Puis on dirait encore que quand je serais entré à la Comédie-Française, tu m’aurais écrit une lettre pour me dire que tu étais mon ami et que tu avais envie de le rester…
Enfin, un jour, nous nous serions baladés sans parler sur les sentiers de Picardie. Nous aurions sûrement croisé Mme Lemercier Yvette du Vésinet qui ne sort jamais sans son berger allemand.
Là, je t’aurais montré un assemblage de quelques textes qui auraient signifié pour moi le partage d’un territoire commun à notre amitié.
Ce serait tout ce que je préfère de toi, que je n’aurai jamais le talent d’écrire, mais que je pourrais faire entendre sur une scène de théâtre.
Une alliance fraternelle.
Tu serais venu à la première et tu m’aurais dit avec ton sourire cyclopédien :
– Desproges à la Comédie-Française… étonnant, non ?
Et je t’aurais répondu :
– Non.
Et nous serions allés boire un verre de Château Figeac pour oublier les crabes et les vautours.

Christian Gonon

04 janvier 2010

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