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À nous deux maintenant !

Nadège Coste ( Mise en scène )


: Présentation

Création originale, d’après J’ai tué, de Blaise Cendrars, Le Tombeau de Couperin, de Maurice Ravel et l’Op. 33a d’Arnold Schönberg, et les peintures d’Otto Dix

« Me voici les nerfs tendus, les muscles bandés, prêt à bondir dans la réalité. J'ai bravé la torpille, le canon, les mines, le feu, les gaz, les mitrailleuses, toute la machinerie anonyme, démoniaque, systématique, aveugle. Je vais braver l'homme. Mon semblable. Un singe. Œil pour œil, dent pour dent. À nous deux maintenant. À coups de poing, à coups de couteau. Sans merci. Je saute sur mon antagoniste. Je lui porte un coup terrible. La tête est presque décollée. J'ai tué le Boche. J'étais plus vif et plus rapide que lui. Plus direct. J'ai frappé le premier. J'ai le sens de la réalité, moi, poète. J'ai agi. J'ai tué. Comme celui qui veut vivre. »
Blaise Cendrars, extrait de J’ai tué, 1918.


Dans le cadre du centenaire de la Première Guerre mondiale, Transversales passe une commande à la Cie des 4 coins et à Nadège Coste, pour la création d’un spectacle ayant pour thème « les auteurs combattants ». Dans une envie de ne pas produire un spectacle qui ne soit pas simplement et directement historique ou commémoratif, la compagnie propose une œuvre personnelle, empreinte de ses questionnements.
La Cie des 4 coins, en répondant, avec intérêt, à cette invitation, a choisi de s’attacher à la tension qui existe entre l’indicible (nous ne saurons jamais véritablement ce qu’est la guerre) et la nécessité de produire et de recevoir un discours (l’artiste étant en première ligne dans cette transmission). C’est de cette tension que naissent les choix esthétiques qui président à ce spectacle. Les interprètes sont là pour rendre présents les combats, sensibles les enjeux humains, en même temps qu’ils sont simplement là, en 2015, avec nous, spectateurs, pour tâcher de trouver ensemble un moyen de nous souvenir.


Comment raconter la guerre à deux, à trois, quand cette guerre est bien celle de l’ampleur, de la multitude ? Comment être au plus proche de l’humain, tout en faisant entendre, en faisant sentir, la machinerie qui sous-tend la guerre ?
Les textes de Blaise Cendrars, la musique de Maurice Ravel et les dessins d’Otto Dix nous ont permis de construire un spectacle qui renvoie à nos interrogations.
Comment représenter la guerre ou la mémoire que nous en avons ? Comment faire face à l’horreur ?
Comment croire encore en la puissance de l’expression artistique ? Quelle est l’essence de la guerre ?
Telles sont les questions, existentielles et esthétiques, qui animent la Cie des 4 coins dans son travail de création.
Le spectacle sera sensoriel, en quête d’épure. Nous cherchons à être à la hauteur de la justesse émotionnelle et intellectuelle des œuvres qui nous ont inspirés.
Le Tombeau de Couperin, d’abord, dans sa grande sensibilité. Maurice Ravel a dédié chacun des mouvements à un musicien mort au front, et son œuvre élégiaque laisse une place à la douceur, tout en esquissant la violence des combats.
Der Krieg, cycle de dessins d’Otto Dix, ensuite, pour sa puissance graphique et le portrait sans fard, exempt de toute mythologie, de toute glorification, de toute hypocrisie, qu’il fait des tranchées. Son esthétique à la fois très formelle et n’obéissant à aucun dogme de l’époque, bien qu’il s’inscrive dans son temps, est une source d’inspiration majeure pour la Cie des 4 coins, qui s’efforce de proposer un spectacle aussi « vrai » que possible.
Les textes de Blaise Cendrars, enfin. Le premier coup de foudre est venu de J’ai tué, court récit en forme de poème en prose, qui fait entendre cette époque, dépeint l’horreur de la guerre, en même temps qu’il place l’individu face à lui-même, face à l’acte du duel. L’expérience de la guerre, au fond, est celle de la peur, de l’attente, du froid, de l’inconfort… C’est l’expérience de la fraternité, de l’horreur, et de tant de choses que nous n’imaginons pas. Mais c’est avant tout et surtout l’expérience du meurtre d’autrui autorisé, du désir de vivre. Cendrars développe une écriture éminemment poétique, détourne l’épopée guerrière, la confession, pour écrire un poème cinglant de vérité, tout entier tendu vers ce dénouement fatal, vers l’essence de l’être soldat, qui n’est autre que l’essence de l’homme.
Mais Cendrars, c’est aussi le romancier, l’écrivain attachant, qui met sa verve au service d’une peinture vigoureuse et terrible des réalités de la guerre. Nous avons trouvé en ce Cendrars-là le passeur, le témoin, celui qui est capable de relier les horreurs de la guerre et notre présent de spectateurs.
La pianiste Sarah Briganti et les comédiens Reda Brissel et Franck Lemaire figurent davantage des manières de raconter, des angles d’attaque différents, que des « personnages ». Chacun renvoie le spectateur à une dimension de lui-même. Nous espérons que cette polyphonie nous permettra de servir le propos. Nous y chercherons, en tout cas, la signification que l’on peut donner à la guerre, à sa sublimation artistique, à notre nature humaine.

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