Figaro est dans sa loge, il va entrer en scène. Mais voilà plus de deux cents ans qu’il arpente les planches, c’est l’heure du bilan.
Né sous la plume de Beaumarchais en 1775, à la veille de la révolution française, Figaro était alors un personnage virevoltant, insolent et provocateur, il portait haut les idées des Lumières... Mais cent cinquante ans plus tard, Ödön Von Horváth a fait basculer son destin en écrivant Figaro Divorce : Figaro est devenu fonctionnaire du pouvoir en place.
Sa carrière a dérapé, c’est certain, mais pourquoi ? Et à quel moment ? Figaro voudrait y voir clair. Il passe en revue toutes les œuvres écrites pour lui : les pièces de Beaumarchais, de Odon Von Horváth, les opéras de Rossini, Mozart, Darius Milhaud ...
Mais ce sont les derniers mots du Mariage de Figaro qui retiennent le plus son attention, comme s’ils renfermaient la clé de l’énigme : « Tout finit par des chansons »...
Il y a dans ces mots comme une joie résignée, immobile, une joie bien différente de celle du Barbier de Séville. Son rire était alors une force de résistance face à l’ennui et à l’injustice : « Je me presse de rire de tout, de peur d’être obligé d’en pleurer », disait-il alors.
Et si, à force de rire, Figaro avait oublié de regarder le monde autour de lui ? Et si aujourd’hui, en croyant rire, il ne faisait que chanter ?

Thomas Condemine