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2-3... grammes

mise en scène Bernard Falconnet

: Extraits

Le Père : Elles m’ont dit : c’est pas la peine que tu viennes et elles m’ont laissé là. Quel jour on est ? Qu’est-ce que ça change quel jour on est ? Je sais pas ils se ressemblent tous. Le mercredi et le dimanche, le 2 juin et le 8 novembre. L’autre jour ils m’ont dit : on est le 5 juin, il neigeait, alors…
J’ai pas toujours été comme ça, ah non, j’étais mieux avant. Ma femme aussi. On était mieux avant. C’était mieux avant. Elle s’est mise à boire tôt. Jamais su pourquoi, elle avait tout ce qu’elle voulait. Parfois il faudrait faire preuve de discernement avec l’alcool. Moi j’étais jeune, j’étais… vert, sportif. Et musicien, je me rappelle. Je jouais dans la fanfare municipale, de l’hélicon. J’avais choisi l’hélicon. C’est gros un hélicon. Je me disais, comme ça, je pourrai me cacher derrière.
En fait ça marchait pas bien. Quand il y a un hélicon dans une formation tout le monde regarde l’hélicon. Et à tous les coups ça excite la curiosité. Les gens veulent savoir qui il y a derrière. Ils veulent connaître la tête de l’hélicon. J’étais devenu, à mon corps défendant, la star de la fanfare. D’ailleurs mes camarades m’appelaient la star, ou Starhélicon. Ça me faisait penser à Fellini. Ma femme, elle, m’appelait Staralacon. L’hélicon ça ressemble au soubassophone, vous voyez ? Ça se porte comme ça. Vous le passez là, sur l’épaule, comme un sac à dos, et là, devant, ça ferait le tour. Bon, là ça passerait pas parce qu’il y a la chaise. Ensuite vous avez là les pistons, les pistons et puis l’embouchure, pour souffler. Et puis là le pavillon, il est plus haut, mais… avant j’avais pas cette raideur, ça c’est un accident de voiture coup du lapin, et puis après j’ai pété un anévrisme. Ils ont dit il y aura des séquelles, ben y’en a pas trop. On se tient.
Je me souviens pas bien ce que j’ai fait ce matin mais on se tient.


La Mère : un jour je lui ai dit au médecin – il était pas commode lui, il te culpabilisait ses patients mon vieux. C’est pas bien de boire il disait. Un jour j’ai entendu à la radio qu’une alcoolique avait eu un prix je sais pas quoi. Hein. Une femme alcoolique qui a un prix, c’est pas tous les jours. Des fois je pense que l’alcool a pas que du mauvais. Elle s’appelait Duras. Il m’a dit c’est qui Duras, l’alcool c’est que mauvais – bon je disais je lui ai dit : mon foie va bien, je le sens, je crois que je mourrai avant lui. Eh bien ça l’a fait rire. Si vous aviez un peu d’humour, tous, j’en serais peut-être pas là…


Texte de Bernard Falconnet
Editions L’Act Mem à Chambéry

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