Les Larmes d'Oedipe : Extrait 1
(p. 15)
Avec l'aimable autorisation des éditions Lémeac - Actes Sud
OEDIPE. Que se passe-t-il ? Ta voix trahit ta peine.
CORYPHEE. Tu n’es pas au courant ?
ŒDIPE. Une rumeur gronde, mais je ne sais rien.
CORYPHEE. Athènes brûle. Il y a des manifestations partout. A Syntagma, à Omonia. La police a enfumé le centre-ville, on peut à peine respirer, il y a des centaines d’arrestations, les forces de sécurité ont chargé à coups de matraque, mais personne ne part et les jeunes affluent. Il n’y aura plus une seule vitrine, et les voitures seront retournées et cramées comme des bêtes.
ANTIGONE. Contre qui la grande Athènes est-elle en guerre ?
CORYPHEE. Contre elle-même. Dans la soirée, un policier a abattu un jeune garçon dans le quartier d’Exarchia, Alexandros. C’est son nom. Il avait quinze ans. La ville a flambé aussitôt. L’adolescent est, dit-on, entre la vie et la mort, et s’il faut qu’il meure, la Grèce entière mourra. Pardonnez-moi. J’ignore si c’est le chagrin ou les gaz lacrymogènes. La police abat un jeune homme et je ne sais pas ce que je peux faire. Je n’a pas envie de casser de vitrines ni de retourner des voitures. Je ne sais que chanter. C’est ridicule n’est-ce pas ?
ŒDIPE. Mourir et chanter s’accordent bien. Nous aussi avons connu de grands malheurs et avons vu mille fois notre cité trembler. Nous chantions en pleurant comme toi, alors reste avec nous et chante pour l’agonisant que je suis.
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