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Couverture de Le Colonel des zouaves

Le Colonel des zouaves

de Olivier Cadiot


Je ne peux pas tout écouter, je sers. Je fais attention à ce que je fais. Je glisse le bras vers l'avant, demi-tour souple sur les genoux, tout le poids du corps vers l'aval de la table. Je sers, je fais attention. Je ferai disparaître les mauvais souvenirs. Je chantonne pour oublier que je dois oublier quelque chose, le grip de ma semelle de crêpe striée adhère au parquet glissant.


Je suis expérimenté, j'ai un moral d'acier, je fais un sans-faute, je ne ferai pas tomber le plat.


Travail pur sans frottement.
Je dis tout ce que je fais à la même vitesse que je le fais.
Je suis bien réglé.
Je suis là, c'est moi, ce sont mes mains qui tiennent le plat, il n'y a aucun problème, je vois le plat, je chantonne très doucement la chanson qui permet de faire bien les choses en temps réel.
Je suis moi et personne d'autre.


Je ne ferai pas tomber le plat. Plus que trois personnes à servir, personne n'entend ma chanson. Je chante très doucement entre mes dents, je souris minusculement, je suis une machine sans erreur, je suis souple et coordonné, je suis non vivant.


Le Colonel des Zouaves, extrait page 32.


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