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Couverture de L'Opéra du dragon

L'Opéra du dragon

de Heiner Müller

Texte original : Drachenoper traduit par Maurice Taszman , Renate Taszman


« Mesdames et messieurs, nous n’en ferons pas un mystère
C’est un conte qu’aujourd’hui nous vous racontons
Du nouveau, nous l’espérons, pour les oreilles et les yeux.
IL ÉTAIT UNE FOIS, personne ne l’a vu,
Pourtant, ici ou là, cela arrive encore
Vous verrez le Dragon, qui fait bouillir de l’eau.
C’est bon contre le choléra. Mais le bienfaiteur
Du bec et des griffes, exige ces honoraires
Bon an, mal an, il rafle ses dividendes
Sur le dos de ses patients reconnaissants
Qui de gaieté de coeur entament son refrain.
L’une ou l’autre créature fait son petit profit
Et manie la brosse à reluire sur les griffes du monstre.
Vous verrez la belle Elsa, mal fiancée
Et son père, le grand archiviste qui n’y peut rien faire
Car en ce lieu, en ces temps-là,
Le pain quotidien est le meurtre quotidien.
Le Dragon a fait élire Elsa, fiancée de l’année
Ce qui veut dire que ses jours sont comptés.
Le lit du dragon sera son cercueil,
La robe de mariée, un linceul.
C’EST LA VIE. Mieux vaut en prendre son parti.
C’est alors qu’intervient monsieur Lancelot
Qui se moque des dragons et n’attend rien des dieux.
Il engage un combat et le combat sera dur
Il se poursuit jusqu’au jour d’aujourd’hui.
Le dragon apparaît sous mille métamorphoses
La terre tourne, le MAKE-UP efface les rides.
Il combat avec du napalm et de l’aide alimentaire
Il proclame son humanité, son argent peut tuer.
Mais notre héros n’est pas seul et son épée n’est pas de bois.
Et de nombreuses têtes pensent sous le manteau qui le rend invisible.
À la fin, elles font une découverte:
Les têtes du dragon, elles aussi, tombent de haut en bas.
Mais il s’avère bientôt que l’on n’est pas au bout du chemin,
Car les géants sont grands grâce aux nains.
Dans la lueur de l’aube, de la semence du Dragon,
Surgissent démocratiquement des dragons en réduction
Pour les secondes noces avec la même fiancée.
La peau du fiancé est couverte d’écailles
Les citoyens font la fête mais la fiançée dit Non.
C’est alors que tourne le vent et que la pierre se met à danser.
Des murs s’écroulent, demain est aujourd’hui
Trois fois déclarée morte, la révolution en surgit.
Les écailles tombent. Qui n’apprend rien tombe aussi.
L’homme nouveau fait ses premiers pas. »


Prologue de L’Opéra du dragon de Heiner Müller


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